Épisode 7: Ma Marianne à moi…

« Le Paquebot », ainsi que je nomme l’immeuble où j’habite, n’est pas près d’appareiller, trop ancré dans le quartier de Wazemmes, à Lille. Les moussaillons ne sont pas du genre à squatter chez les uns ou les autres, mais comme dans les temps difficiles, il y a une ligne de vie qui nous accroche et nous relie, fine et aussi solide que le fil d’une toile d’araignée. » Jacques Lohier.
– T’as vu ?
– J’ai vu quoi ?
Je suis allé voir, et elle était là, sur mon appui de fenêtre. Ma Marianne à moi.
Je ne sais toujours pas qui a déposé ce buste à cet endroit. Si cela avait été l’un de mes voisins, il aurait fini par me le dire. Et puis nous avons notre petite « donnerie », un endroit à côté des boîtes aux lettres où l’on dépose ce dont nous n’avons plus l’usage mais qui peut encore servir à qui le souhaite. Alors pourquoi chez moi ?J’ai tout de suite été attiré par ce délicat visage féminin, par la couleur passée de ses cheveux, par le rose pâle de ses lèvres et le bleu délavé de ses yeux. Et pour moi, il a tout de suite été évident que c’était Marianne.
Soyons honnête, c’est une Marianne en toc, une Marianne de plâtre creux dont le crâne est fêlé et qui ne résisterait pas à une maladresse ou à la jalousie du chat.

Ici, au Paquebot, on ne parle guère de politique. On échange parfois quelques avis sur tel ou tel épisode de la campagne. On peut frôler l’énervement ou s’étonner d’un emballement vite réprimé. Rien de plus. En tout cas sur la coursive.
Dimanche prochain, j’accompagnerai Adèle au bureau de vote qui est à côté du marché de Wazemmes. Elle claudique un peu et craint les bousculades. Mais elle sera seule dans l’isoloir.
En attendant, Marianne est sur mon radiateur, à l’opposé d’une antique tourniquette à mayonnaise dont je me sers toujours.
« Le Paquebot », ainsi que je nomme l’immeuble où j’habite, n’est pas près d’appareiller, trop ancré dans le quartier de Wazemmes, à Lille. Les moussaillons ne sont pas du genre à squatter chez les uns ou les autres, mais comme dans les temps difficiles, il y a une ligne de vie qui nous accroche et nous relie, fine et aussi solide que le fil d’une toile d’araignée. » Jacques Lohier.
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