Stéphane M: Un portail vers le monde des adultes…

« De New-York à Paris, en passant par bien d’autres lieux. J’ai découvert des gens, et des objets magiques qui, dans de minuscules éraflures, conservent les marques du temps. J’ai réalisé les portraits de ceux qui protègent ces empreintes de la disparition. Avec l’image de cette trace, j’ai préservé la mémoire de l’oubli. » H. B.

Je n’ai que très peu d’objets ayant appartenu à mon père.
Cette carabine lui avait été offerte par mon grand-père pour son douzième anniversaire, probablement le seul cadeau que Clovis n’ait jamais fait à son fils.
C’était un choix très logique si l’on considère que dans la Vendée rurale de l’époque la chasse était le seul loisir disponible. Pour Clovis c’était d’ailleurs bien plus qu’un loisir mais bien une passion qui occupait l’essentiel de son temps.
Par la suite c’est également avec cette carabine que j’ai appris à tirer. A une époque où les choses n’étaient pas jetables comme aujourd’hui. Je me rappelle encore, enfant, l’impression extraordinaire de posséder un tel objet vieux d’une génération.
C’était un portail vers le monde des adultes, celui des chasses du mercredi et du dimanche. Comment oublier ces longues marches dans les champs à diriger le travail enthousiaste des chiens ponctuées du départ fulgurant d’un animal et parfois la réussite du coup de fusil dans un geste qui semble parfait. Même les odeurs de poudre et de gibier sur la veste de chasse de mon père je m’en souviens parfaitement.
A bien y réfléchir aujourd’hui, c’était même plus que cela, c’était finalement là, pendant ces parties de chasse, les seuls moments de partage avec mon père.

Stéphane M., juin 2017 – Bordeaux

© « Le Laboratoire de Lumière » – 2017



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