Dans son dernier roman Joy Sorman donne la parole à un ours et prouve que l’animal est un personnage romanesque comme les autres. Ou presque…

… Son attirance pour les sujets insolites n’est plus un mystère mais son dernier livre pousse plus loin encore l’audace littéraire. Après « Comme une bête« , récit dans lequel elle contait les tribulations d’un boucher, Joy Sorman n’hésite pas à confier le rôle principal de son dernier roman à un ours. Et pas n’importe lequel!

 

Son héros, hybride monstrueux né de l’accouplement d’une femme et d’un ursidé, se situe dans l’entre deux. Mi-homme mi-bête. Situation inconfortable s’il en est mais prodigieusement féconde pour la romancière qui explore l’étrange frontière entre humanité et bestialité et fait le choix d’un roman en forme de conte.
Il était une fois un ours donc. Animal mythique à l’origine de nombreuses légendes et croyances dont celle selon laquelle le roi des animaux serait un redoutable prédateur sexuel. Jugez plutôt :

De ces amours coupables naîtra l’ourson marqué du sceau de la malédiction dans la peau duquel l’auteur n’hésite pas à se glisser. « Je » est un ours. C’est là que réside toute la puissance et la singularité de ce monologue servi par une écriture étincelante: « A mesure que le souvenir de l’enfant velu s’éloigne en moi, la mélancolie gagne, c’est le sentiment acide d’une disparition, d’un destin escamoté, comme si l’épaisseur de mes poils avait définitivement recouvert la possibilité de vivre ma vie« .
L’ursidé condamné ira de cirques en zoos sous la houlette de maîtres dont l’humanité laisse à désirer. Qui de l’ours ou de l’homme est la bête? Telle est la question posée par ce récit qui se garde bien de donner des réponses et flirte avec notre fascination pour la figure du monstre. Le pari de Joy Sorman était osé, elle le remporte haut la main ravissant son lecteur de la première à la dernière ligne.

La critique Littéraire desmotsdeminuit.fr
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