Julien Blanc-Gras est écrivain voyageur. Il parcourt le monde puis écrit des livres drôles et sensibles. « In utero », dernier en date, invite son lecteur dans une contrée aussi inattendue que peu explorée par la gent masculine: la grossesse.

Rares sont les écrivains à avoir osé s’aventurer sur le terrain. La raison? Si l’on en croit Virginie Despentes  » A moins qu’il y ait un drame, les enfants ne font pas de très bons sujets pour les livres« . Un axiome que l’auteur de « Touriste » et « Paradis (avant liquidation) » va faire mentir en 200 pages retraçant neuf mois de grossesse. Vaste périple autour d’un ventre où se prépare en secret son petit garçon, « In utero » ne néglige pas pour autant quelques escales. Japon, Corée, Chine et Afrique. Julien Blanc-Gras n’est pas homme à poser ses valises trop longtemps.
 
Avant lui John Fante et Philippe Jaenada se sont intéressé de près à la question. Le premier dans « Pleins de vie« , le second dans « Le cosmonaute » petit livre aussi drôle que désespéré. Dans tout les cas, l’arrivée prochaine d’un enfant s’apparente à un séisme. Julien Blanc-Gras ne le cache pas: « J’écris ce livre pour apaiser mes angoisses en les formulant. Tenir ce journal de grossesse participe du processus d’acceptation. Je suis dans la position de l’explorateur, je découvre un continent en formation,celui de la Paternité. Je m’embarque dans le plus long, le plus puissant, le plus indélébile des voyages« .

 

Tour du monde
De la première échographie à la perte des eaux en passant par la découverte du sexe de l’enfant, le futur papa consigne les temps forts de cette histoire déjà vécue par plusieurs milliards d’êtres humains mais néanmoins indétrônable. A ce détail près que l’odyssée prend sous sa plume une tournure désopilante. Ajoutez à cela un sens certain de l’autodérision, un soupçon de mauvaise foi et vous aurez une idée de ce que vous réserve ce journal tenu par un jeune quadra mi-émerveillé mi-terrorisé par l’arrivée de ce tyran: le bébé. « Il n’y a aucune raison de paniquer. Nous allons créer et accompagner une existence. C’est une formidable nouvelle, me dis-je en tapant vol aller simple sur mon clavier« .
 
Face à l’angoisse grandissante, l’écrivain globe-trotter a deux parades. La première écrire. La deuxième se remémorer les us et coutumes observées sous d’autres latitudes. « In utero » c’est drôle de tropiques sous un nombril. On fait le tour du monde sans quitter celui de la femme de l’auteur. De Lagos à Sapporo, ce journal est aussi une étude des comportements liés à l’arrivée de l’enfant à l’échelle planétaire. On y apprend quantité de choses. Qu’il n’y a pas de terme pour désigner « papa » chez les Moso, ethnie de la région de Yongning en Chine. Qu’il y a cent quarante millions de naissances chaque année dans le monde. Soit « quasiment un Nigeria de plus tous les douze mois. » Que « chez certains nomades de Sibérie, le père rassemble vingt cinq têtes de canard autour de la tente pour annoncer la naissance d’un enfant » tandis qu’en France on envoie un sms.
 
Vous l’aurez compris, « In utero » est le livre le plus drôle jamais écrit par un homme sur la grossesse, le plus instructif aussi. Parfois même le plus tendre. L’on pense à Pierre Desproges: « L’accouchement est douloureux. Heureusement, la femme tient la main de l’homme. Ainsi, il souffre moins« .

Les lectures d’Alexandra
La critique Littéraire desmotsdeminuit.fr

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