« De New-York à Paris, en passant par bien d’autres lieux. J’ai découvert des gens, et des objets magiques qui, dans de minuscules éraflures, conservent les marques du temps. J’ai réalisé les portraits de ceux qui protègent ces empreintes de la disparition. Avec l’image de cette trace, j’ai préservé la mémoire de l’oubli. » H. B.
Baigné dans les effluves de cuir, dans les conversations familiales sur le métier, étant la 6ème génération de cordonnier bottier, ce métier s’imposait à moi comme une évidence. Depuis tout jeune, je regardais mon père réparer et fabriquer des chaussures dans sa première boutiques dans le 5ème arrondissement de Paris.
Passionné par ce métier, j’ai décidé à 15 ans de faire ma formation de cordonnier bottier chez les Compagnons du devoir.
Lors de mon apprentissage, notre professeur de cordonnerie et botterie nous organise un voyage à l’étranger pour découvrir notre métier avec un savoir-faire différent de celui que nous pratiquons en France. La destination: Florence en Italie. Dès notre arrivée à Florence, nous devions nous-mêmes trouver un bottier pour effectuer notre stage de 4 semaines. Lors de mes recherches, je passe la porte d’un atelier, à 2 pas du Palazzo Pitti. Dès mon arrivée, je suis accueilli par un bottier japonais avec qui nous échangeons quelques mots, entre l’anglais et l’italien ma langue paternelle. Après quoi, il accepte de me prendre en stage. Lors de mon stage, des liens forts se créent, une passion commune, une atmosphère exceptionnelle ! Après plusieurs jours, le bottier voit en moi un brin de talent et décide de parler de moi au fondateur de la marque, Stefano Bemer une légende de la botterie à mes yeux !! J’allais rencontrer mon mentor !! Lors de notre rencontre, une fusion se créa. Il décida de venir tous les jours suivants pour me transmettre son savoir, à la fin de ce stage exceptionnel, Stéfano Bemer me tendit un paquet que je m’empressais d’ouvrir: une râpe!
Un outil à première vue simple mais lorsque l’on apprend que c’est une râpe entièrement piquée à la main et c’est celle de Stephano Bemer, la valeur de cet outil devient unique!
Je décide de parler de cet objet parce que très peu de temps après mon passage à l’atelier, un bottier japonais qui travaillait à l’atelier lui aussi, m’apprenait le décès de Stefano Bemer atteint d’un cancer.
7 ans après mon passage en Italie, je me sers de cette râpe lors de chaque fabrication de chaussure sur mesure, à chaque fois que j’utilise cet outil, mes souvenirs me traversent et me rappellent à quel point ce stage en Italie sera ancré dans ma mémoire.Anthony C. – Paris75005 – janvier 2019
Anthony C. – Paris75005 – janvier 2019
© « Le Laboratoire de Lumière » – 2018
► Mémoire d’objets, la collection
► La collection « Photo parlée »
► nous écrire: desmotsdeminuit@francetv.fr
► La page facebook desmotsdeminuit.fr Abonnez-vous pour être alerté de toutes les nouvelles publications.
Articles Liés
- Le départ d'un ogre
Jacques le Goff avait la pipe gaillarde et il racontait comme personne. Historien, né en…
- Paul Personne, les mots bleus.
On sent un gars simple, un mec du coin. Son père était ouvrier, son pseudo…
-
« Hollywood, ville mirage » de Joseph Kessel: dans la jungle hollywoodienne
29/06/202052990Tandis que l’auteur du Lion fait une entrée très remarquée dans la ...