Álvaro Brechner. « Compañeros », un film pour dire: « El pueblo jamas sera vencido »

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Le réalisateur quadragénaire uruguayen interroge l’histoire de ce pays de trois millions d’habitants, nommé autrefois « la Suisse d’Amérique latine », de forte tradition démocratique entachée par la parenthèse dictatoriale des années 70 et des guerres sales du continent. Il filme trois hommes d’extrême-gauche, otages plus que prisonniers des militaires dont l’un deviendra modeste Président …

Après Sale temps pour les pêcheurs (2009) d’après une nouvelle de Juan Carlos Onetti et Mr Kaplan (2014) comédie dans laquelle un senior est obsédé par l’idée de disparaitre sans avoir réalisé de grands exploits, le troisième long métrage d’Álvaro Brechner a pour premier titre La noche de 12 años (La nuit de douze ans)
Le scénario est inspiré de l’histoire contemporaine de l’Uruguay et de récits de prisonniers politiques Tupamaros  douze ans pendant la dictature militaire de 1973 à 1985. Parmi ceux-ci José Mujica, Mauricio Rosencof et Eleuterio Fernández Huidobro. Les trois guerilleros ont été traités comme des otages par les militaires, torturés, déplacés. Compañeros est moins un film politique ou historique qu’un questionnement sur la résistance humaine devant la folie dans laquelle veulent faire tomber les bourreaux. C’est, plus largement, un hommage rendu aux prisonniers politiques. À la même époque en Europe était dénoncée les formes de « torture blanche » dont ont été victimes les nationalistes irlandais comme Bobby Sands en Irlande du nord ou les terroristes de la bande Baader-Meinhof en Allemagne.    
À leur libération, si l’un deviendra écrivain, les deux autres entameront des carrières politiques parlementaires dans la démocratie rétablie et José Mujica sera finalement président de l’Uruguay de 2010 à 2015. Àlvaro Brechner qui le connaît se dit fasciné par la modestie et la facilité d’abord d’un homme qui dit n’avoir pas pour rien les yeux devant la tête. Sa fervente évocation fait penser à Nelson Mandela.   
L’approche du réalisateur est plus psychologique que politique malgré un final, la libération en 1985, où est chanté l’incontournable chant révolutionnaire latino « Le peuple ne sera jamais vaincu ». Dans ce film très maîtrisé et très documenté, on est plus près de Kafka et de l’absurde que de Costa-Gavras et du militantisme cinématographique.
Le réalisateur de Compañeros et l’ancien président urugayen José « pepe » Mujica. Photo d’Álvaro Brechner.
« Álvaro Brechner est réalisateur, scénariste et producteur. Il a réalisé plusieurs courts-métrages, des documentaires et deux longs-métrages, Sale temps pour les pêcheur (Mal día para pescar) et Mr.Kaplan, lauréats de nombreux prix internationaux, et sélectionnés à des dizaines de festivals tels que la Semaine de la critique du Festival de Cannes. Son troisième long-métrage Compañeros a été présenté au festival de Venise et sélectionné en compétition cette année au festival de Biarritz. » 

© Festival biarritz amérique latine

Álvaro Brechner. Biarritz, septembre 2018 © RR
Compañeros était en compétition au Festival biarritz amérique latine. Il obtient le prix du public.« 

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