Une pertinente comédie de résistance. Féministe et arabe en Israël: drôlement pas évident.
L’intégrisme est une maladie mortelle.
Maysaloun Hamoud, réalisatrice de « Je danserai si je veux »
Soit une coloc de femmes palestiniennes à Tel Aviv. Palestiniennes à Tel Aviv, un point de départ déjà osé. Elles ont notamment en commun d’avoir mis les distances avec le cocon et les traditions familiales devenues insupportables dans un monde qu’elles veulent juste et moderne, qui autorise les extravagances. Layla, une belle jeune femme, libre, volontaire, avocate. Selma, tout autant rebelle, sa famille n’a de cesse de lui proposer des maris (« Cache tes tatouages et tes piercings! »), c’est peine perdue, elle est lesbienne. Ces deux-là sont des fêtardes – sachons-le Tel Aviv est aussi un lieu de jouissances – alcool, pétards et autres substances délassantes sont au menu de leurs nuits interlopes en ville. La troisième locataire se marie, elle cède sa place à une cousine, inversement décalée. Nour est une timide étudiante en informatique, voilée version musulmane sincère mais intégriste, elle s’étonne discrètement des cadavres de bouteilles et des cendriers pleins qui blasphèment le décor de sa nouvelle adresse. Le choc des cultures est annoncé, il va produire ses effets, pas seulement ceux qui seraient trop facilement attendus.
Tout est dans le titre, en tout cas sa moitié: « Si je veux« . Encore faut-il le vouloir ou même imaginer qu’on peut le vouloir pour une femme d’un pays arabe. Les femmes dansent ou veulent danser, les hommes sont des pleutres, des salauds ou les deux. Quand le pamphlet féministe semble un peu caricatural, c’est qu’on oublie d’où il vient. Il reste à faire dans nos sociétés occidentales pour mettre la femme à une juste place d’égalité, encore beaucoup, mais bien peu face à une nécessaire remise en cause d’un obscurantisme machiste en usage plus ou moins violemment dans la culture religieuse arabe. Il n’y a pas que le mariage arrangé/forcé, l’interdiction de l’homosexualité qui sont inacceptables proteste Maysaloun Hamoud: dans son cri de femme, il y a aussi une révolte contre une impossible cohabitation entre israéliens et palestiniens, elle la pose dans un habile mélange de deux langues qui veulent s’ignorer.
Car la réalisatrice est habile et cinéaste douée. Elle propose un état des lieux plutôt dramatique sans se départir d’une efficace légèreté de ton, pas loin de celui d’Elia Suleiman, un grand frère, qui lui aussi dégomme en douceur. Accessoirement, mais au cinéma c’est aussi le principal, elle sait construire un film et pour servir une mise en scène colorée, elle a su trouver et diriger des comédiennes épatantes. Pour une œuvre de résistance réjouie mais qui sait que ça n’est pas gagné: l’issue de ce bal démasqué ressemble à un match nul.
Je danserai si je veux – Maysaloun HAMOUD (Palestine) – 1h42
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