La mer est bleue, une vague se brise! Les carnets d’ailleurs de Marco et Paula #218
Marco a embarqué Paula, qui venait de débarquer en Amérique, vers le Nord, à Cape cod, une péninsule mythique.
C’est une après-midi ensoleillée et nous nous promenons sur une plage de Cape cod (le cap aux morues) avec des amis, le long de l’océan. La mer est d’un bleu profond, avec de longues ondulations que soulignent parfois des ourlets blancs d’écume. Une vague se brise, bien avant la plage. Un long rouleau qui semblait venir de loin. C’est une plage américaine sur l’Atlantique, un ruban de sable bordé de dunes qui s’étire vers l’horizon comme une invitation à grimper vers le ciel.
Je replie l’image et la rouvre. Dix ans plus tôt; la mer est d’un bleu profond et la plage s’étend paresseusement vers l’horizon. Les palmiers ont remplacé les pins, et quelques barques de pêcheurs traînent leurs filets sur les ondulations de l’Atlantique, pendant que Paula et moi jouons avec un cerf-volant que taquinent des oiseaux. Nous sommes sur une plage de Côte d’Ivoire, parsemée de déchets apportés d’Abidjan par les courants.
Pensées d’autres mers…
Un vent fort s’est levé, et nous sommes allés nous promener sur l’autre versant de la péninsule de Cape cod, du côté de la baie, sur une plage bordée de dunes derrière lesquelles, entre la sombreur des massifs de pins et l’azur de la lagune, ondoient des champs d’herbes sauvages allant du vert au fauve, avec des ombres mordorées. Les vagues sont courtes et vives, se chevauchant sans pouvoir s’épancher dans des jaillissements d’écume, et l’eau, chargée de sable, a pris des tonalités émeraudes.
De nouveau l’image se déplie, dans un temps bien plus ancien, sur des plages et des sentiers californiens, souvenirs de sable, de vent et d’embruns qui se mélangent dans les brumes de ma mémoire. Un vent froid venu de l’océan apporte une nappe de brouillard qui s’étale doucement dans les jardins de la ferme du Temple du Dragon Vert, le centre Soto Zen installé au bord de l’océan où j’allais le dimanche. Un peu plus haut sur la côte, autour de la baie de Tomales, de vastes étendus d’herbes rases vallonnent et, un peu plus loin encore, au pied des falaises, serpentent de longues plages désertes léchées par les longs rouleaux du Pacifique.
Par la fenêtre ouverte…
C’est une fin d’après-midi tranquille, et nous sommes allés sur une plage, un peu au hasard, et parce qu’elle était au bout de la route. Les ombres s’allongent, et devant le ciel se dresse un phare. Cape Cod est réputé pour ses phares. Plus loin, sur un promontoire, une maison veille seule sur la mer et les herbes qui ondulent sous le vent.
Une fenêtre s’ouvre dans ma tête: Le soleil décline, il y a un phare, une maison solitaire, des herbes sauvages allant du vert au fauve, avec des ombres mordorées. Du vent. Je suis dans un tableau d’Edward Hopper, qui peignait ici, à Cape cod, au début du XXème siècle, la mer, les phares, des maisons solitaires, des silhouettes contemplant le ciel au pied duquel se couche le soleil. Tout cela est très familier.
Mon esprit traîne souvent dans les tableaux de Hopper; il traine souvent aussi dans les tableaux californiens de Richard Diebenkorn. Il traîne aussi parfois dans les tableaux de Magritte, entre chien et loup. Et dans d’innombrables autres œuvres. Peu importe, finalement, si je ne peux plus voyager. Mon esprit est depuis longtemps nomade, il erre dans l’univers qu’ont imaginé les peintres. Nomade dans un musée imaginaire.
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