Lettres ou ne pas être #12: effondrement

On ne naît pas thésard, et on s’étonne souvent de l’être devenu… Un choix de vie assumé, au prix de quelques angoisses.
Aujourd’hui, c’est l’effondrement. Je viens de finir le livre que je rêvais d’écrire, que j’avais fantasmé en rédigeant mon projet de thèse, le livre qui démonte les ressorts sociologiques de la Recherche en un style élégant et efficace. Ce petit livre à la couverture rouge, que j’ai lu en une après-midi à la terrasse d’un café, c’est le Pour Albertine. Proust et le sens du social de Jacques Dubois.
À partir du personnage d’Albertine, la prisonnière, Jacques Dubois analyse le fonctionnement d’une socialité proustienne qui devance ou annonce les théories bourdieusiennes de La Distinction – et c’est ce que je voulais montrer dans une partie de ma thèse.
La manière dont la société imprime ses marques au corps des individus, la détermination implacable des « styles de vie » qui façonnent chaque groupe social, l’affrontement entre une aristocratie déclinante et la grande bourgeoisie qui se bat pour la légitimation des titres sociaux… Ce livre, c’est Proust et Bourdieu réunis, mes deux livres de chevet qui se rejoignent en un nouveau chef-d’œuvre qui est (serait ?) un pur plaisir de lecture si chaque page ne m’accablait pas d’être déjà écrite, en pointant mon inutilité et la folie de continuer à travailler sur l’un des auteurs les plus étudiés au monde. Je viens trop tard, tout a été écrit. Triste jeudi, grosse dépression et canicule.
Et le pire, c’est que Jacques Dubois est absolument adorable. Je l’ai croisé à une journée d’études et, avant même d’avoir lu son livre et d’avoir pu lui parler, j’ai éprouvé pour lui une sympathie – et même une forme de tendresse – immédiate. À croire que le mouvement de cristallisation autour d’un livre ou d’une personne découle des mêmes alchimies inexplicables, et qu’il n’y a pas de rancune possible quand un chercheur écrit le livre auquel on aurait rêvé de consacrer cinq ans de sa vie.
À partir du personnage d’Albertine, la prisonnière, Jacques Dubois analyse le fonctionnement d’une socialité proustienne qui devance ou annonce les théories bourdieusiennes de La Distinction – et c’est ce que je voulais montrer dans une partie de ma thèse.
La manière dont la société imprime ses marques au corps des individus, la détermination implacable des « styles de vie » qui façonnent chaque groupe social, l’affrontement entre une aristocratie déclinante et la grande bourgeoisie qui se bat pour la légitimation des titres sociaux… Ce livre, c’est Proust et Bourdieu réunis, mes deux livres de chevet qui se rejoignent en un nouveau chef-d’œuvre qui est (serait ?) un pur plaisir de lecture si chaque page ne m’accablait pas d’être déjà écrite, en pointant mon inutilité et la folie de continuer à travailler sur l’un des auteurs les plus étudiés au monde. Je viens trop tard, tout a été écrit. Triste jeudi, grosse dépression et canicule.
Et le pire, c’est que Jacques Dubois est absolument adorable. Je l’ai croisé à une journée d’études et, avant même d’avoir lu son livre et d’avoir pu lui parler, j’ai éprouvé pour lui une sympathie – et même une forme de tendresse – immédiate. À croire que le mouvement de cristallisation autour d’un livre ou d’une personne découle des mêmes alchimies inexplicables, et qu’il n’y a pas de rancune possible quand un chercheur écrit le livre auquel on aurait rêvé de consacrer cinq ans de sa vie.
À suivre.
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