John Scofield à Marciac: back to the future

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Un enchanteur dans la programmation d’une 39ème édition qui hésite entre gros sons spectaculaires et retour aux jazz les plus purs.

On pourrait faire semblant de tout savoir de John Scofield qui n’est plus tout jeune (1951) en pompant discrètement sa notice de Wikipedia. N’empêche qu’en le pistant vite fait sur le web, on prend conscience que ça fait un bail qu’on a fait connaissance avec ce guitariste délicat et protéiforme. Depuis au moins 30 ans, puisqu’au début des années 80, Miles Davis – inégalable découvreur de talents – l’avait embauché et révélé. Il fut alors l’un de ceux qui accompagna Miles dans sa meilleure période fusion en signant, après et avant quelques autres, les discrètes mais vigoureuses partitions de guitare du plus inventif jazzman de tous les temps.

 

On imagine aisément que Scofield a fréquenté le rock, le blues et le funk, c’est aussi un grand serviteur du swing, même lorsqu’il flirte avec la note abstraite. Une variété, un parcours stylistique dans ce qui fut ses futurs de précurseur, qu’il a mis au menu de sa prestation à Jazz in Marciac devant un public médusé par son imagination musicale autant que par sa modestie: pas de recettes, du fait main par un artisan d’art, jamais deux fois le même concert. Aux 5000 spectateurs conquis, presque timide, il confie à mi-parcours: « Vous écoutez, ça se voit et ça me fait plaisir! » Comment faire autrement?

A ses côtés, deux musiciens tout autant séduisants. Steve Swallow, vieux routier de la contrebasse qu’il a désormais troquée pour une basse électrique à caisse dont il tire, tout en douceur et délicatesse, d’exquises harmonies quand il ne prend pas la main pour improviser sur le thème. Non moins impressionnant, Bill Stewart à la batterie, indéréglable métronome, la richesse de son jeu n’est jamais démonstrative, on aime même ses solos, ce qui est rare.

On aurait passé la nuit avec ce trio, mais il devait céder la place à un autre John, lui aussi ancien de Miles, lui aussi prince de la guitare fusionnelle. John McLaughlin n’a rien perdu de la virtuosité et du doigté de ses riffs de l’époque maintenant lointaine du Mahavishnu orchestra et de Shakti, il n’a rien inventé non plus depuis.
Ce soir-là, à Marciac, le charme de John Scofield l’a emporté.

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