Quand Solveig Anspach, battue par le cancer à 54 ans, dirigeait Karin Viard
Ces deux-là, Solveig Anspach et Karin Viard ont déjà travaillé quand la comédienne fut dans « Haut les cœurs! » (1999) le double cinématographique de la réalisatrice qui explorait alors les chemins de cette « longue maladie » qui la terrasse aujourd’hui. Karin Viard y avait gagné un César de meilleure actrice. On imagine donc une complicité dans leurs retrouvailles pour « Lulu femme nue » (2013).
Solveig Anspach dans Desmotsdeminuit, à Cannes en mai 2001 pour « Made in Usa » et en 2003 pour « Stormy weather ».
Dans ce mot à mot enregistré au festival de cinéma de Sarlat en novembre 2013, Karin Viard évoque « Lulu, femme nue », le dernier film de Solveig Anspach…
A 14 ans d’écart, toujours avec cette légèreté qui lui permet de contenir le tragique, la cinéaste pose la question du sujet et de son désir de vivre et de surmonter ou de trouver ce qu’il est quand la société ou son entourage l’empêchent de le savoir. Lulu était bien nue jusqu’à ce jour –c’est l’entame du film- où un entretien d’embauche, amusant pour le spectateur mais sinistre pour elle, lui fait rater un train et lui permet d’oser prendre son temps : un, puis deux, puis plusieurs jours loin de sa condition sociale et de son assignation à un rôle de mère -on l’imagine suffisamment bonne- de trois enfants mariée à un homme gris mais violent.
Elle n’a pas d’argent, mais la mer et ses sensations sont à deux pas. Elle n’a plus personne mais le hasard et les inconnus des chemins de traverse valent mieux que l’inexistence dans le regard des siens. Karin Viard flotte avec justesse dans cette incarnation d’une femme au tournant, gentille sans mièvrerie, plus intelligente qu’intellectuelle. De quoi croiser quelques laissés pour compte : Charles (Bouli Lanners) récemment sorti de prison et chaperonné par deux frères aux pieds nickelés. Charles qui lui fait la cuisine et lui offre l’occasion de repenser ses rapports amoureux et domestiques. Marthe (Claude Gensac), vieille femme aussi solitaire qu’énergique qu’elle vole avant l’amitié et l’entraide, Virginie (Nina Meurisse), une serveuse de bar houspillée par sa patronne (Corinne Masiero) qu’elle aidera à faire un choix.
Il y a une belle humanité dans ce film. Une manière de filmer juste au plus près du banal et du quotidien. Solveig Anspach était aussi documentariste.
desmotsdeminuit, nomades à Sarlat 2013, 2014…
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