« Je ne répondrai plus jamais de rien » de Linda Lê: lettre à une absente 📚
Le dernier livre de la romancière franco-vietnamienne est la lettre d’une femme en colère adressée à sa mère décédée. En colère contre un homme qui n’a jamais su être un père encore moins un mari. L’occasion pour la romancière de brosser le portrait en creux d’une mère laissant derrière elle une énigme que va tenter de résoudre sa fille.
Ils se sont rencontrés dans un centre pour réfugiés. Elle, la demandeuse d’asile après avoir quitté son pays en pleine guerre civile. Lui l’avocat brillant, défenseur de tous ceux qui, comme elle, n’ont nulle part où aller. Elle « La loqueteuse sans patrie« . Lui, l’homme providentiel. D’emblée les dés étaient pipés. Il a été séduit par sa douceur, sa candeur, sa beauté. Elle ne pouvait que succomber au charisme de celui qui lui tendait la main alors qu’elle n’avait rien. « Cette égarée qu’un vaillant défenseur des faibles, des démunis, des solitaires en détresse » allait prendre sous son aile et épouser. De cette union forcément bancale allait naître un enfant. Une petite fille marquée au fer rouge du sceau de la colère. De la rage.
La sauvage
Son père l’appelait d’ailleurs « La Sauvage« , terme que la narratrice reprend à son compte. « Si j’avais écouté ma colère, je l’aurais balafré, je me voyais tel un chat-tigre, en train de labourer ses joues de mes griffes« . Comment accepter ce père qui, sa vie entière, a préféré une autre femme à sa mère? Ce père qui affirmait « cette double vie nécessaire à son équilibre, à son bien-être » tandis que sa femme souffrait mille morts. C’est cette colère trop longtemps contenue que charrie ce livre plein de fureur et de larmes. Une colère d’enfant qui n’a pas supporté de voir sa mère, éternelle étrangère, dénigrée par un mari inconséquent sans jamais se rebeller. Violent réquisitoire contre un « père à éclipses« , Je ne répondrai plus jamais de rien n’est pourtant pas un livre règlement de compte mais une déclaration d’amour à cette mère dont la seule rébellion fut cette phrase, répétée au soir de sa vie, qui donne son titre au roman.
Bouleversant.
Édition Stock – 144 pages
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