Carambolage sur l’A95. Les carnets d’ailleurs de Marco & Paula #227
Suite à un accident de voitures, Paula fait l’expérience de la police locale.
Je suis montée dans une voiture de police! Une vraie comme dans les films. Avec sur le tapis de sol du passager tout le bazar de sachets de chips et de gobelets de café auquel je m’attendais. Je ne suis pas montée à l’arrière et le policier ne m’a pas appuyé sur la tête pour me permettre de me glisser dans l’habitacle (ils font ça dans tous les films comme si d’être arrêté empêchait les gens de penser à baisser la tête).
Mon premier souvenir de voiture de police américaine est la Gran Torino rouge et blanche de Starsky & Hutch que nous regardions en famille le dimanche après le déjeuner, il y a quelques décennies. « Ma » voiture de police était bien plus quelconque, de forme et de couleur. Mais l’habitacle était une sorte de mini bureau avec ordinateur sur tablette pivotante; on est en Amérique tout de même.
Terre-plein central…
Je n’étais pas en état d’arrestation. J’avais juste besoin de traverser l’autoroute et le faire à pied aurait été suicidaire. Aussi, le « trooper », coiffé d’un galurin conique (je n’ai pas écrit comique), m’a proposé de me conduire de l’autre côté.
Qu’est-ce que je faisais à pied sur le terre-plein d’une des autoroutes les plus passantes de la Côte Est, celle qui longe l’Atlantique du nord au sud?
À la suite d’un fort et soudain ralentissement, ma voiture – déjà à l’arrêt sur la file du milieu – venait de se faire tamponner par l’arrière. Mais comme ma voiture était la dernière d’une chaîne de six véhicules, et parce que j’étais restée loin du véhicule précédant, je n’avais reçu qu’une poussée surprenante mais somme toute anecdotique. Mon premier réflexe avait été de rejoindre la bande d’arrêt d’urgence à ma droite. Les autres conducteurs, enfin ceux dont la voiture roulait encore, s’étant garés à gauche, sur le terre-plein central, je les avais rejoints. Comme l’accident venait de se passer, tout le monde roulait alors doucement et traverser à pied avait été facile.
Bilan : beaucoup de tôles froissées et quelques moteurs hors d’usage mais pas de blessé. Sauf peut-être la conductrice de la voiture ayant provoqué le carambolage. Mais impossible de le savoir car cette personne s’est enfuie à pied, profitant d’une bretelle d’entrée à proximité, laissant sa voiture derrière elle. D’aucuns ont de suite affirmé qu’il devait y avoir de la drogue dans le véhicule ou qu’il s’agissait d’une voiture volée. Plusieurs l’avaient même filmée dans sa course, prêts à lancer la chasse… J’ai émis l’hypothèse qu’elle était peut-être sous le choc, pensant à une scène assez pénible de Sailor et Lula de David Lynch, mais j’étais bien la seule à le croire. J’ai regardé ce qu’il y avait dans cette berline: des sacs de courses. J’ai pensé que sa vie avait terriblement basculée suite à quelques instants de distraction.
En attendant la police…
Pour ma part, je ne savais pas si je pouvais m’en aller puisque moi et ma voiture n’avions rien subi ni rien endommagé. J’ai préféré attendre la police pour ne pas être accusée de délit de fuite. Chaque pays a ses codes et j’ai appris à être prudente. J’ai encore en mémoire de m’être fait « rançonnée » en Côte d’Ivoire car j’avais stoppé ma voiture, le feu à la hauteur de ma portière mais en-deçà de la bande blanche au sol. Un gendarme, qui n’attendait que cette belle aubaine, m’avait accusée d’avoir grillé le feu alors même que j’avais sagement attendu qu’il tourne au vert, assez longuement d’ailleurs. L’amende avait été fort chère, ma colère énorme et vaine, le policier finissant par me sortir que je ferai mieux de rester chez moi à élever des enfants.
Le policier américain à qui j’ai eu à faire était plutôt paisible, voire blasé, même si à ma question sur la conductrice en fuite, il a juste lâché abruptement quelques vocables parmi lesquels je n’ai reconnu que le mot « prison ». Vu le froid qu’il faisait ce jour-là, j’ai regretté qu’il prenne tant de temps à contrôler tous nos papiers bien au chaud dans sa voiture, sans doute en consultant des bases de données (comme dans Les experts, j’en suis sure). En attendant qu’il me rapatrie de l’autre côté de l’autoroute, j’ai fini par me réfugier dans la voiture d’une des conductrices, mais pas de celle en fuite. J’ai lu et vu bien trop de polars pour savoir qu’on ne pollue pas une scène de crime.
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