Allo Papa Tango Charlie…… Le Laboratoire de Lumière. Semaine 39

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Il me faut sortir du brouillard, sortir de ce cocon, de la demi-ville qui m’étouffe depuis quelques jours. Je pensais pouvoir y trouver une forme d’apaisement, y trouver un quotidien rassurant, apaisant. Il n’en n’est rien. De long en large, j’ai parcouru la ville, surtout en long. La ville est dessinée ainsi.

Je suis incapable pour l’instant de prendre le large et pourtant j’en rêve. Des problèmes d’organisation, des rendez-vous ratés à force d’espérer. Le rendez-vous prévu avec Reza, photographe au National Géographic : déprogrammé, à cause d’un mal de dent, qui finalement se transforme en mal dedans, faute de pouvoir m’alimenter correctement. Incapable de parler ou d’exprimer, je n’avais réalisé depuis quelques jours que des images dans le brouillard, certes symboliques, pas innocentes. J’étouffais. J’étouffais de ne pas être capable de m’organiser. J’en étais à me culpabiliser de ne pas pouvoir dire que j’avais simplement envie de silence pour réfléchir, de ne pas pouvoir justifier mes envies de solitude et mes rêves de Bermudes. J’avais failli perdre de l’altitude.
Mais ça, c’était la semaine dernière, aujourd’hui c’est différent, le brouillard s’est levé, j’y vois un peu plus clair, j’y vois un peu plus loin. L’éclaircie s’est produite lors d’une de mes longues balades quotidiennes; au détour d’une rue, j’ai croisé un ami. Bruno, je ne l’avais pas vu depuis mon départ en Bretagne, il y a plusieurs années. Nous décidons de faire un bout de chemin ensemble pour le plaisir de la conversation. Il se souvient des deux expositions que j’ai réalisées dans cette ville, l’une intitulée « Julie, qui est-tu Julie ?  »  qui avait pour sujet un personnage féminin, la seconde présentait les images d’un livre: Des Souliers et des Hommes publié chez Julliard.

 

« Julie, qui est-tu Julie ? »

 

Le professeur Choron. « Des Souliers et des Hommes ».

Bruno me parle de son travail dans l’environnement et de ses nouvelles fonctions. Il est président de la médiathèque de la ville. Je lui parle de mes balades en Bretagne, de mes nombreux déménagements depuis cinq ans, de mon expo à venir dans le Morbihan et d’un possible voyage Outre-Atlantique. Notre balade nous amène au café du coin, celui ou j’ai pris mes habitudes depuis quelques jours. La discussion se poursuit autour d’une boisson chaude, je prends des nouvelles de mes amis restés aux alentours. Au fil de la conversation, nous convenons d’un rendez-vous pour que je visite la salle d’exposition de la médiathèque et que je puisse rencontrer l’équipe chargée d’organiser les différents événements culturels.    
Vendredi dernier, lors de ma visite à la médiathèque, je retrouve Bruno en compagnie de son équipe pour une visite des lieux. La salle d’exposition est volumineuse, avec des proportions similaires à un studio photo: environ cent cinquante mètres carrés au sol et une quinzaine de mètres de hauteur sous plafond. Habitué des plateaux photos, l’espace me semble familier. L’équipe me propose de réfléchir à un projet à partir de ce lieu, en utilisant cette structure constituée de béton et de verre, comme support. Un projet bien différent de celui que je vais réaliser en juin de cette année, qui lui, se déroulera dans un cadre bucolique. Certes le projet n’est pas pour tout de suite et heureusement. Il est question de programmer ce travail pour fin 2015, début 2016. Et c’est l’évocation de ce projet à long terme qui me fait voir plus loin. Lorsque j’avais réalisé et terminé mon exposition dans la ville du Bono (56) en 2013, j’avais plongé dans une dépression interminable, un vrai blues sans musique. L’exposition terminée, les images rangées dans des cartons, je n’avais plus de projet, plus d’envie. J’avais quitter la ville. Je n’ai surtout pas envie de revivre ça.
La proposition de Bruno modifie ma perception du travail à faire dans les mois à venir.
Il est toujours question de faire l’exposition en juin 2015 dans le Morbihan, mais je pense qu’elle va prendre une forme différente de celle initialement prévue. Je ne sais pas exactement comment formuler ce changement de direction. Disons que l’exposition ne sera pas une finalité, mais plutôt la présentation d’une fraction de travail. Une exposition est une finalité, le travail photographique une continuité. J’ai juste besoin d’une continuité. Que chaque image soit la première, que l’image à réaliser demain soit la plus importante, ni meilleure, ni moins bonne que celles réalisées les jours précédents. Une image par jour pour regarder en avant, une image par jour pour regarder autrement.

 

« Le prof »

Je suis Charlie.

LLL. Semaine 39

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