Geneviève Dulude-De-Celles, réalisatrice québécoise, réussit une juste approche du délicat passage de l’enfance à l’adolescence, révélant une jeune comédienne prometteuse.
Mylia a 12 ans, âge sensible, celui où il faut se résoudre à quitter l’enfance. Elle vit dans un monde comme préservé, à l’écart des tumultes en tout cas ceux de la ville, elle habite non loin d’une forêt où elle s’était construit des cabanes. Une petite sœur de 7 ans, bout de chou espiègle, si mignonne et rigolote qu’elle ne l’aide pas à être désormais une vraie grande sœur. Les parents? un couple désuni on ne sait pourquoi dans ce havre de paix, leur séparation prévisible pèsera lourd dans le final de cette histoire forte d’une nouvelle adolescente.
Mylia entre au collège, la beauté difficile d’un âge réputé ingrat, pas confiance en elle, maladroite dans ses velléités obligées par les usages des autres. Car la voilà dans un grand bain occupé par de petites dindes croyant, elles, déjà tout savoir du mode des grandes et prêtes à séduire les apprentis machos de l’établissement. Elle se fraye timidement une place dans la classe et se retrouve à côté de Jimmy, un amérindien qui vit dans la réserve proche. Ça tombe bien, les premiers cours d’histoire comprennent « Éducation à la citoyenneté« , ce qui provoquera quelques vifs débats avec des élèves qui se contentent de penser que les indiens sont toujours quasiment des sauvages.
Sans trop le savoir, Mylia se rapproche de Jimmy, ils ont la différence en commun, juste ça, pas assez pour tout de suite partager leurs cultures et leurs envies. Il veut être fidèle à sa tradition, comme il peut dans un monde plastique, elle veut tenter d’entrer dans le monde des grandes, ce qui sera d’abord l’occasion d’un triste fiasco. Mais sa métamorphose est en cours, il y en aura sûrement, d’autres, elle est encore si jeune.
La révélation d’une jeune comédienne
Attachante chronique d’une mutation, sucrée-salée, toute en douceurs et impatiences, Une colonie ressemble à son héroïne: entre deux hésitations (parfois un peu longues) le film semble parfois chercher son sujet, la différence entre cultures, la délicate transition de l’enfance à l’adolescence. C’est l’étonnante Émilie Bierre (Mylia), lunaire autant que lumineuse, qui le maintient sur les rails. La jeune comédienne est quasiment de tous les plans, toujours d’une étrange justesse. Elle porte une petite perle cinématographique, captée au plus près, qui n’a pu être imaginée et réalisée que par une femme, et une femme qui a des souvenirs pointus de ce moment délicat autant que violent.
- Une colonie – Geneviève Dulude-De-Celles (Canada) – 1h41
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