Le réalisateur letton réussit cette nouvelle mais originale variation thriller sur le cauchemar des exilés économiques.
Oleg quitte sa petite république de Lettonie et ses salaires de misère pour céder au rêve de l’Europe de l’Ouest. Il est ouvrier boucher et débarque à Bruxelles où il s’est trouvé un plan dans une usine à viande. Le rêve s’évanouit vite, il est payé au lance-pierre et se fait virer à la première injuste occasion. Le voilà errant comme un clandestin à la recherche d’embauches. Une cible idéale pour Andzejs, petit sous-mafieux polonais mais gros salaud qui cache avec talent ses plans sordides derrière une bonhomie qui en a déjà coincé plus d’un. Sentant le mauvais plan, employé sur des chantiers au black mais pas payé, Oleg s’en va mais, faute de mieux revient vers ce grand séducteur qui, apparemment pas rancunier lui offre un faux passeport polonais. Il lui trouve un job d’homme à tout faire dans une centrale de taxis, avec bien sûr une idée derrière la tête: la braquer. On ne rigole plus, à coup d’humiliations, de sévices et de violences Oleg devient l’esclave piégé d’Andzejs. Margosa, la compagne de l’affreux qui l’a pourtant mise sur le trottoir, dans une velléité d’insoumission, lui conseille de décamper. Pas si simple.
Film de gens, film de genre
Oleg est plus qu’un nouveau film sur le drame des migrants, jouets trop faciles de tous les trafiquants sans scrupules. On croit d’abord assister à une énième variation cinématographique sur le thème en s’ennuyant parfois sur quelques longueurs de la première partie. C’est ensuite que s’exprime tout le talent de Juris Kursietis qui semble bien connaître la question de l’exil économique. Pour mieux en dire le drame et le piège, le réalisateur emmène peu à peu son récit vers le film de genre, thriller et angoisse, et il le fait habilement. On le suit, la boule au ventre, dans la nasse qu’il installe autour de son anti-héros, l’enfermant dans une image carrée claustrophobique dont il ne peut s’échapper, dans des plans-séquences, caméra à l’épaule, comme en live. On pense à l’angoisse que, dans un contexte certes très différent, Haneke avait terriblement mise en place dans Funny games: le piège infernal. Dans son entreprise de juste dramatisation du cauchemar de ceux qui rêvent de vivre mieux chez nous, il réussit d’autant mieux grâce à deux acteurs qui composent les personnages principaux: Valentin Novopolskij (Oleg), plus encore Dawid Ogrodnik (Andzejs), effrayant de justesse.
Oleg de Juris Kursietis (Lettonie) – 1h48
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