« Lettres à Véra » de Vladimir Nabokov: il l’appelait « Petit papillon »
Écrites de 1923 à1976, les lettres de l’auteur de « Lolita » à sa femme Véra content l’histoire d’un amour fou inscrit sous le signe de la littérature.
Tristesse et mystère et délice…
Comme surgie de la noirceur
Mouvante d’un lent bal masqué
Tu es parue sur le pont sombre
La jeune femme qui se reconnaît trouve alors le courage d’écrire à celui qu’elle admire. Le 26 juillet 1923 Nabokov lui répond. C’est le début d’une correspondance qui va s’étendre sur plus d’un demi-siècle sans jamais rien perdre de sa tendresse ni de son inventivité. Véra a été le grand amour de Nabokov qui dans ces lettres, souvent quotidiennes, lui conte par le menu le programme de ses journées. Partie de tennis, chasse au papillon, écriture, lectures publiques et souvent soucis d’argent. Nabokov dit tout absolument tout, y compris de quoi se compose ses repas, à celle qui deviendra son agent littéraire, sa traductrice, sa conseillère et sa plus précieuse lectrice. « Toi et moi sommes tout à fait spéciaux: les merveilles que nous connaissons personne d’autre ne les connaît et personne d’autre n’aime comme nous », affirme l’auteur d’Autres rivages à celle qu’il épousera deux ans après. Pour preuve ces petits noms qui rivalisent de fantaisie – « Petit papillon », « Mon chaton », « Petit coq », « Ma chère vie », « Minoute », « Souricette », « Mon petit bichon », « Mon arc-en-ciel-ensoleillé » – pour désigner celle à qui il écrit « Tu es entrée dans ma vie non comme on rend une visite, mais comme on arrive dans un royaume où toutes les rivières attendaient ton reflet et toutes les routes tes pas ».
Tendres, drôles et toujours poétiques, chacune de ces lettres est un enchantement. La preuve chaque jour renouvelée d’un amour fou. « Tu fais de ma vie quelque chose de léger, de prodigieux, d’irisé », résume l’auteur de La transparence des choses dans cette correspondance où la fantaisie mène la danse. Un document unique à plus d’un titre, Véra ayant fait le choix de détruire ses propres lettres.
Fayard – 856 pages
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