« La clarinette » de Vassilis Alexakis: à l’ami disparu
Dans « La clarinette » Vassilis Alexakis évoque le mal qui frappe son pays natal, la Grèce, et celui qui a emporté son meilleur ami, l’éditeur et romancier Jean Marc Roberts.
Rien ne se passe jamais comme prévu. Le titre du dernier roman de Vassilis Alexakis devait être « La minute de silence« .
Son thème: la mémoire et la crise grecque. A la fin de l’été 2011, l’auteur de « L’enfant grec » reçoit un appel téléphonique de Jean-Marc Roberts, son éditeur et ami, qui lui annonce qu’il est atteint d’un mal incurable. Il décédera en 2013. Le projet initial de Vassili Alexakis ne pouvait qu’en être bouleversé. Le roman s’intitulera désormais « La clarinette », Jean-Marc Roberts trouvant « La minute de silence » trop lugubre. Quant à son thème initial, la crise grecque, il va inextricablement s’imbriquer avec le mal dont souffre son ami et le contaminer peu à peu tout entier. Aussi quand le narrateur de « La clarinette » retourne à Athènes et découvre sur les murs de la ville le slogan « Je dépéris » fait-il un parallèle immédiat avec l’état de son éditeur resté à Paris. Triste ironie du sort ce dernier s’éteindra le 25 mars, jour de fête nationale pour les Grecs et désormais jour de deuil pour l’écrivain. Si l’amitié s’inscrit au coeur de ce roman, son véritable thème est à n’en pas douter la fidélité. A un pays, la Grèce, et à un homme qui fut bien plus qu’un ami et un éditeur: un frère spirituel.
« On devine que tu serais très fâché si on s’apitoyait sur ton sort« . Dont acte. Pas une once de pathos dans ce livre qui évoque tour à tour la misère dans les rues d’Athènes, les menaces proférées contre les immigrés par Aube Dorée, les visites à l’hôpital mais aussi des souvenirs plus joyeux comme les femmes aimées, les enfants, les prix littéraires. Certaines anecdotes sont vraies. D’autres inventées. Vassilis Alexakis lance des passerelles entre son pays natal et son pays d’adoption, le monde des morts et celui des vivants, la réalité et la fiction et passe de l’un à l’autre avec une grâce de funambule qui n’appartient qu’à lui. Un art qui lui vient sans doute de sa double culture comme le prouve la réflexion sur la langue qu’il mène tout au long de ce récit dans lequel vrai et faux ne cessent de se côtoyer. « J’ai toujours pensé que les récits autobiographiques comportaient autant de mensonges que les oeuvres de fiction. C’est vrai des miens, en tout cas, que j’intitule romans pour la bonne raison que je mens tout le temps, comme dans la vie. Un mensonge transposé dans un livre n’est peut être qu’à moitié faux puisqu’on l’a vraiment dit« . Faute avouée à moitié pardonnée.
Au plus fort de la maladie, Jean Marc Roberts a trouvé le courage de venir à bout d’un dernier livre « Deux vies valent mieux qu’une » dans lequel il a retracé ses péripéties de santé. « Où trouvais-tu la force d’écrire? s’interroge son ami. « Je suppose que tu la puisais dans les mots mêmes. Ils connaissaient forcément tes livres: les mots sont nos premiers lecteurs, n’est ce pas? » Dans ce roman en forme de lettre à lettre à l’ami disparu, les mots de Vassilis Alexakis sont d’une pudeur et d’une tendresse infinies, parfois nostalgiques, toujours incroyablement vivants. « Je me suis juré -écrit il au romancier dans les tout derniers temps- de raconter cette période, sinon avec la même grâce tout au moins avec la même légèreté que toi« . Mission accomplie, cher Vassilis.
Son thème: la mémoire et la crise grecque. A la fin de l’été 2011, l’auteur de « L’enfant grec » reçoit un appel téléphonique de Jean-Marc Roberts, son éditeur et ami, qui lui annonce qu’il est atteint d’un mal incurable. Il décédera en 2013. Le projet initial de Vassili Alexakis ne pouvait qu’en être bouleversé. Le roman s’intitulera désormais « La clarinette », Jean-Marc Roberts trouvant « La minute de silence » trop lugubre. Quant à son thème initial, la crise grecque, il va inextricablement s’imbriquer avec le mal dont souffre son ami et le contaminer peu à peu tout entier. Aussi quand le narrateur de « La clarinette » retourne à Athènes et découvre sur les murs de la ville le slogan « Je dépéris » fait-il un parallèle immédiat avec l’état de son éditeur resté à Paris. Triste ironie du sort ce dernier s’éteindra le 25 mars, jour de fête nationale pour les Grecs et désormais jour de deuil pour l’écrivain. Si l’amitié s’inscrit au coeur de ce roman, son véritable thème est à n’en pas douter la fidélité. A un pays, la Grèce, et à un homme qui fut bien plus qu’un ami et un éditeur: un frère spirituel.
« On devine que tu serais très fâché si on s’apitoyait sur ton sort« . Dont acte. Pas une once de pathos dans ce livre qui évoque tour à tour la misère dans les rues d’Athènes, les menaces proférées contre les immigrés par Aube Dorée, les visites à l’hôpital mais aussi des souvenirs plus joyeux comme les femmes aimées, les enfants, les prix littéraires. Certaines anecdotes sont vraies. D’autres inventées. Vassilis Alexakis lance des passerelles entre son pays natal et son pays d’adoption, le monde des morts et celui des vivants, la réalité et la fiction et passe de l’un à l’autre avec une grâce de funambule qui n’appartient qu’à lui. Un art qui lui vient sans doute de sa double culture comme le prouve la réflexion sur la langue qu’il mène tout au long de ce récit dans lequel vrai et faux ne cessent de se côtoyer. « J’ai toujours pensé que les récits autobiographiques comportaient autant de mensonges que les oeuvres de fiction. C’est vrai des miens, en tout cas, que j’intitule romans pour la bonne raison que je mens tout le temps, comme dans la vie. Un mensonge transposé dans un livre n’est peut être qu’à moitié faux puisqu’on l’a vraiment dit« . Faute avouée à moitié pardonnée.
Au plus fort de la maladie, Jean Marc Roberts a trouvé le courage de venir à bout d’un dernier livre « Deux vies valent mieux qu’une » dans lequel il a retracé ses péripéties de santé. « Où trouvais-tu la force d’écrire? s’interroge son ami. « Je suppose que tu la puisais dans les mots mêmes. Ils connaissaient forcément tes livres: les mots sont nos premiers lecteurs, n’est ce pas? » Dans ce roman en forme de lettre à lettre à l’ami disparu, les mots de Vassilis Alexakis sont d’une pudeur et d’une tendresse infinies, parfois nostalgiques, toujours incroyablement vivants. « Je me suis juré -écrit il au romancier dans les tout derniers temps- de raconter cette période, sinon avec la même grâce tout au moins avec la même légèreté que toi« . Mission accomplie, cher Vassilis.
La clarinette – Vassilis Alexakis – Seuil – 360 pages
Les lectures d’Alexandra…
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