« Forêt obscure » de Nicole Krauss: Tel-Aviv la ville de tous les possibles

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La romancière américaine, prix du meilleur livre étranger en 2006 pour  » L’histoire de l’amour « , signe un roman éblouissant sur les métamorphoses de nos vies.

Le titre est extrait de L’Enfer de Dante et résume bien ce que vivent les deux personnages de ce livre:

 

Au milieu du chemin de notre vie
Je me suis trouvé dans une forêt obscure
Car la voie droite était perdue

Jules Epstein d’abord juif new yorkais richissime qui, au soir de sa vie et sans que quiconque ne comprenne pourquoi, décide de liquider tous ses biens. Nicole ensuite, qui porte le même prénom que l’auteur, ce n’est pas là un hasard, et qui, non contente d’assister à l’effondrement inéluctable de son mariage, s’aperçoit qu’elle ne parvient plus à écrire. Deux personnages en perte de repères donc et qui espèrent trouver à Tel Aviv des réponses aux questions qui les hantent. 
Pour Nicole cela ne peut s’envisager qu’au Hilton où elle avait coutume de passer ses étés enfant « Lorsque l’idée me vint de rêver ma vie depuis le Hilton, je me trouvais, comme je l’ai dit, à un moment difficile sur les plans personnel et professionnel. Les choses auxquelles je m’étais autorisée à croire  – l’irréfutabilité de l’amour, le pouvoir du récit, qui permettaient aux gens de passer toute leur vie ensemble sans la moindre divergence, panacée de la vie de famille , je n’y croyais plus. J’avais perdu mon chemin. » Quant à Jules Epstein la perte progressive de désirs coïncida étrangement avec la perte de son téléphone portable. « Par la suite quand ses enfants y repensaient et essayaient de saisir ce qui s’était passé, ils voyaient que le début de sa transformation coïncidait avec sa perte d’intérêt pour le plaisir. Un fossé s’était ouvert entre Epstein et son bel appétit, qui avait reculé au-delà de l’horizon que chaque homme porte en lui. »

Étranges similitudes

Roman sur l’identité et les métamorphoses inévitables de l’âme, Forêt obscure relève le pari de raconter de l’intérieur les errances de la psyché. Aussi n’est il pas totalement surprenant de voir surgir en son mitan le fantôme de Kafka, auteur entre-autre de La Métamorphose. Nicole et Jules ne se connaissent pas, ne se croiseront pas, mais leur voyage à Tel Aviv offrira d’étranges similitudes et de nombreuses surprises.
Il faut s’aventurer sans crainte dans le beau roman de Nicole Krauss qui sait l’art de conter la difficulté d’être sans se départir d’un humour irrésistible. C’est là sans doute la plus grande qualité de ce livre qualifié d’éblouissant  par Philippe Roth dont la romancière ne cache pas combien il l’a influencée.
 
éditions de l’Olivier – 288 pages
> lire un extrait du livre

 

(photo d’llustration © Goni Riskin)

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