Les Carnets d’ailleurs de Marco & Paula #145: Un remède de cheval

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Paula traîne dans ses bagages de nomade une nostalgie pour les animaux dont elle pouvait s’occuper au quotidien. Mais, sur la route, il y a toujours son oasis à animaux blottie près de Genève.

Marco vient de virer d’un mouvement de jambe le chat de nos amis qui menaçait de le prendre pour un coussin. Marco aime les animaux… de loin. Par contre, les animaux l’aiment plutôt bien et je ne l’ai jamais vu en difficulté que ce soit avec un cheval ou un chien. Ils doivent capter qu’ils ont affaire à un alpha.
 
Cela ferait-il de lui un patient réceptif à la zoothérapie? J’ai de sérieux doutes. C’est une question dont j’aurais pu débattre avec l’amie de longue date chez qui je viens de passer vingt jours à me ressourcer. Là, j’ai ressenti comme toujours le plaisir de retrouver ses animaux et de m’en occuper au quotidien. Ce sont des plaisirs qui me manquent beaucoup, car notre nomadisme me retient d’avoir un animal (au soulagement de Marco); j’ai déjà laissé trop de chats et de chevaux sur le bord du chemin, même si je leur ai toujours trouvé un humain de rechange.
 
J’ai rencontré cette amie en Algérie. Elle s’était échappée une dizaine d’années de Suisse pour les contrées plus mouvementées de la Yougoslavie et de l’Algérie. Rentrée au pays avec mari et enfants, elle a repris son métier de psychomotricienne dans une institution. C’est dire qu’elle connaît plutôt bien le handicap. Et puis la ferme familiale, sa curiosité, son désir de ne pas se figer ni intellectuellement, ni professionnellement et sans doute deux ou trois petites choses qui lui appartiennent, l’ont conduite vers la zoothérapie. Elle sait où elle va même si le chemin n’est pas toujours bien éclairé.
 
Pendant mes séjours, j’ai vu plusieurs fois des enfants, individuellement ou en petit groupe, venus voir, toucher – et plus si affinité – les animaux de sa ferme: des ânes, des chevaux, des lapins, des cochons d’Inde et un chien. Mon amie éduque patiemment tous ces animaux à accepter benoîtement que des gamins aux gestes mal contrôlés les caressent, leur parlent fort et même leur montent dessus quand ils ne leur passent pas dessous.
 
Ainsi, un âne de nature irascible, bottant facilement, m’a laissée pantoise tant il devient paisible lorsque des enfants le manipulent comme s’il comprenait qu’un geste brusque de leur part ne signifie pas la colère ou l’agressivité mais n’est qu’une simple maladresse.
 
Le chien, une boule de tendresse – sauf pour les animaux à plumes qu’il aime croquer sur le vif – s’est fait taper récemment sur le crâne par un minot en colère. Il aurait pu se sauver, voire attaquer, mais il s’est seulement mis à trembler de stupeur.

 

Peyo, le cheval de l’association « Les sabots du cœur » 

Alors empathie ou simple dressage? Une autre amie m’a transmis par internet un reportage* sur un cheval qui visite régulièrement les patients du service gériatrique d’un hôpital de Dijon. Soignants et dresseur évoquent la compassion particulière de ce cheval qui, on ne sait pas comment, perçoit naturellement la détresse physique et mentale des patients. Difficile de démêler ce qui relèverait de l’éducation ou du dressage ou du renforcement positif ou négatif… il existe autant de théories que de spécialistes éthologiques. Et puis, en creusant un peu plus, on arrive vite à la question pernicieuse de la frontière entre l’homme et l’animal, ou même de l’existence d’une frontière. C’est un vieux débat, qui ne semble pas près de s’éteindre.

 

William Wegman, « The Magic Flute », 1996 .

Sur France Culture lors d’une journée consacrée aux animaux, j’ai appris qu’au Moyen-Âge, deux courants s’opposaient. Pour l’un l’homme devait fuir et bannir toute relation avec un animal (l’homme créé à l’image de dieu ne pouvait entrer en relation avec des créatures soumises et imparfaites); pour l’autre il devait se considérer comme une partie de la communauté des êtres vivants d’Aristote. Quand l’apôtre Paul était aussi invité aux débats, le propos pouvait alors prendre des détours surprenants : « Faut-il faire travailler les animaux le dimanche? » (cf les propos de Michel Pastoureau dans la Fabrique de l’histoire) .

 
Et puis  – pour passer du coq à l’âne – lors de ce séjour j’ai beaucoup entendu parler du président des États-Unis, suite à l’annonce de sa venue au Forum économique mondial de Davos. Les Suisses s’en réjouissaient. Tout de même, à la radio un journaliste a évoqué la possibilité de sa destitution pour cause d’insanité morale. Il n’avait même pas encore entendu Trump décrire lors d’une réunion publique à la Maison Blanche, Haïti et les pays d’Afrique comme des pays « trou de merde ». Je ne suis pas fâchée que notre séjour planifié aux USA s’éloigne, même si, pour reprendre les termes d’un débat pas si in-fréquent entre Marco et moi, 
 » – Oui, je sais…
 – Trump n’est pas l’Amérique, d’ailleurs la majorité des gens n’ont pas voté pour lui, ce sont les grands électeurs …
 – Mais qui élit les grands électeurs ? »   
 
Alors, une zoothérapie avec une limace pour calmer le président, un kangourou pour le mettre KO, ou un crocodile pour le transformer en sac?

 

 

« Shithole » projeté sur la façade de l’hôtel de Trump à Washington …
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