Les Carnets d’ailleurs de Marco & Paula #128: Un « Gaou à Bidjan » (suite)…
Notre jeune ami « Tobie-le Gaou » est moins « gaou »* après quelques jours à Abidjan et sa lagune. Il est temps de partir explorer le centre et le nord du pays aux dynamiques moins évidentes.
Nombreux sont ceux qui tentent de décourager notre projet de voyage à Korhogo et mes envies d’aventures. La route – que nous souhaitons faire en bus, les vols internes africains étant d’un coût indécent – est réputée dangereuse entre nids de poules et bandits de grand chemin coupeurs de routes et faucheurs de bourses.
Même mes amis ivoiriens ne comprennent pas le projet, il faut dire qu’aucun d’eux n’est allé si loin au Nord.
Après avoir choisi une compagnie de bus bénéficiant d’une réputation solide, nous partons pour Korhogo, la ville principale du Nord. A la gare routière nous recevons un avant-goût de ce que sera notre voyage. Les animaux côtoient les hommes et les femmes, les marchandises recèlent des odeurs plus ou moins supportables et, surtout, une nuée de quidams s’affairent autour de nous dans l’espoir de récupérer quelques petites pièces ô combien précieuses!
Le bus s’ébranle enfin et nous voilà partis pour un voyage d’environ sept cents kilomètres qui durera un jour complet. Nous traversons tout d’abord des paysages de forêts tropicales le long de la première – et seule – autoroute du pays, qu’il a fallu des années pour terminer. Achevée il y a moins de quatre ans, celle-ci montre déjà par endroits des signes d’usure. La maintenance est un vain mot en Afrique.
La forêt fait peu à peu place à des champs qui s’étendent au fur et à mesure que nous nous rapprochons de la capitale administrative du pays, Yamoussoukro. La ressource principale du pays réside dans son agriculture de produits qui ne seront – malheureusement – pas ou trop peu transformés sur place: cacao, café, mangue, papaye, et manioc avec lequel on fait de la semoule, le fameux « attiéké ».
L’arrivée à Yamoussoukro se fait alors très rapide, la ville n’est pas très grande et fait office de reliquaire à la mémoire du « Vieux », le père de la nation: Houphouët-Boigny.
Ici, il a laissé au pays une capitale à sa façon, une Fondation pour la paix un rien décatie, un hôtel, le fameux « Hôtel Président » et, surtout, la Basilique Notre-Dame de la Paix, le plus grand édifice chrétien au monde. Nous laissons sur notre gauche ce monument ostentatoire en décalage total avec les pauvres villages qui le bordent: sept hectares de marbre, plus de trois cents colonnes, une hauteur de cent-cinquante huit mètres, vingt mille places assises… les chiffres donnent le tournis. A droite nous découvrons le palais du « Vieux », entouré d’un mur de cinq kilomètres de long, il est bordé par le lac aux caïmans dans lequel les reptiles sacrés mènent une vie paisible, presque bonhomme hormis les jours où un imprudent y tombe et se fait dévorer par les sauriens voraces.
Nous ne marquons pas d’arrêt dans la capitale, nous y passerons une journée au retour.
Plus tard nous arrivons dans la ville de Bouaké. Une très belle ville, chaleureuse, qui étend de longues avenues de part et d’autre de la route. J’apprends que c’est ici qu’une dizaine de français se sont fait descendre au début des années 2000. Le lycée français et l’alliance ont été bombardés et il ne reste plus grand-chose de la présence française dans la ville. Nous n’y descendrons pas, l’histoire est parfois trop fraîche dans les mémoires.
Le trajet est monotone, rythmé par les hordes de vendeurs de rue et les accidents sur la route. Nous croisons le « Tour de Côte d’Ivoire », parti le jour même de Korhogo. Le crépuscule descend lentement. Nous tombons finalement en panne à quatre-vingt cinq kilomètres de notre destination. Une petite heure plus tard nous pouvons enfin repartir mais l’épisode – bien trop ordinaire – ne marque pas les esprits. Nous arrivons à la nuit noire dans le faubourgs de la ville. Ce qui me surprend de prime abord, c’est que, si les habitants se déplacent quasi-exclusivement en moto, le trafic n’en reste pas moins infernal.
Nous ne marquons pas d’arrêt dans la capitale, nous y passerons une journée au retour.
Plus tard nous arrivons dans la ville de Bouaké. Une très belle ville, chaleureuse, qui étend de longues avenues de part et d’autre de la route. J’apprends que c’est ici qu’une dizaine de français se sont fait descendre au début des années 2000. Le lycée français et l’alliance ont été bombardés et il ne reste plus grand-chose de la présence française dans la ville. Nous n’y descendrons pas, l’histoire est parfois trop fraîche dans les mémoires.
Le trajet est monotone, rythmé par les hordes de vendeurs de rue et les accidents sur la route. Nous croisons le « Tour de Côte d’Ivoire », parti le jour même de Korhogo. Le crépuscule descend lentement. Nous tombons finalement en panne à quatre-vingt cinq kilomètres de notre destination. Une petite heure plus tard nous pouvons enfin repartir mais l’épisode – bien trop ordinaire – ne marque pas les esprits. Nous arrivons à la nuit noire dans le faubourgs de la ville. Ce qui me surprend de prime abord, c’est que, si les habitants se déplacent quasi-exclusivement en moto, le trafic n’en reste pas moins infernal.
Levés tôt pour affronter la chaleur du Nord, nous louons les services d’un guide et deux motos. Celui-ci – plutôt affable – nous emmène dans les petits chemins qui serpentent dans les bois d’anacardiers (la noix de cajou). Nous découvrons une carrière où les femmes extraient manuellement depuis des décennies de la pierre qu’elles concassent pour le vendre aux constructeurs**. Plus loin nous apercevons le Rocher Sacré, cher aux animistes, c’est là que l’on immole des animaux afin d’intercéder auprès des esprits de la nature.
Notre tour des environs se prolonge dans les zones d’artisanat. Nous visitons un village de tisserands. Sur la place, une centaine de métiers à tisser s’entrecroisent. On y file le coton des savanes voisines. Nous rencontrons également des orfèvres qui créent des colliers en perles d’argiles peintes à la main. Notre tour se termine avec les sculpteurs sur bois qui produisent masques et amulettes en tous genres, avant de monter au sommet du Mont Korhogo qui surplombe la ville.
La vue est dégagée et le soleil s’apprête à se coucher. Les plaines s’étendent dans toutes les directions et sont parfois percées par de petits monts millénaires.
Après un « kédjenou » de pintade, plat en sauce typique du pays, il est temps pour nous d’aller dormir, la route du retour sera longue!
Je passe mes dernier jours à « Bidjan », entre farniente et rencontres avec des amis ivoiriens dont je connais les proches expatriés en France.
Je retire de ce voyage le souvenir illimité de rencontres, de paysages et, surtout, un apprentissage que je ne soupçonnais pas sur moi-même. Les voyages forment la jeunesse mais pas que! Et, alors que je m’envole pour Paris, je pense qu’il va me falloir du temps pour me faire au métro et à la vie parisienne de nouveau. Nombreux sont les sujets de crispations sociétales qui me paraîtront alors ô combien futiles au regard de ce que d’autres vivent de par le monde.
La vue est dégagée et le soleil s’apprête à se coucher. Les plaines s’étendent dans toutes les directions et sont parfois percées par de petits monts millénaires.
Après un « kédjenou » de pintade, plat en sauce typique du pays, il est temps pour nous d’aller dormir, la route du retour sera longue!
Je passe mes dernier jours à « Bidjan », entre farniente et rencontres avec des amis ivoiriens dont je connais les proches expatriés en France.
Je retire de ce voyage le souvenir illimité de rencontres, de paysages et, surtout, un apprentissage que je ne soupçonnais pas sur moi-même. Les voyages forment la jeunesse mais pas que! Et, alors que je m’envole pour Paris, je pense qu’il va me falloir du temps pour me faire au métro et à la vie parisienne de nouveau. Nombreux sont les sujets de crispations sociétales qui me paraîtront alors ô combien futiles au regard de ce que d’autres vivent de par le monde.
* niais en nouchi, la langue ivoirienne de la rue. Voir Nomad’s Land # 127.
** A trois cent mètres, dans une carrière industrielle indienne est concassé le gravier destiné au macadam.
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