Quel rapport entre le portugais Basil Da Cunha et l’américain Bill Plympton? Aucun. Sauf que chacun, dans leurs façons différentes, disent sur nos sociétés déboussolées. « Les amants électriques » fait rire, « Après la nuit » désespère. Au choix, rire ou pleurer. On conseille les deux.
Après la nuit – Basil Da CUNHA (Portugal) 1h35
Un quartier pourri de délinquance et de violence à la périphérie de Lisbonne, Reboleira, un bidonville coupe-gorges. Sombra, dealer rasta, sort de taule et vit dans une cave, il ne la quitte qu’à la nuit tombée. Pour tenter de régler diverses embrouilles. Son seul ami, un iguane qui partage son antre. Dans cette glauque déshérence, on imagine vite qu’il n’y aura pas d’après la nuit.
Pas vraiment de scénario, plutôt une série de séquences que Basil Da Cunha a construit au jour le jour dans une expérience cinématographique originale avec les habitants du quartier. C’est l’apport documentaire de « Après la nuit » qui est le plus intéressant autant qu’il est désespérant. Il rappelle le très beau clair-obscur « En avant, jeunesse » de Pedro Costa. Si Da Cunha est plus brut, plus dispersé, la sincérité et la vitalité de son projet mérite un détour. C’est un cinéaste, à l’arrache.
Les amants électriques – Bill PLYMPTON (USA) 1h17
Dans ce monde brutal, rions un peu.
L’américain Bill Plympton revient avec son style inimitable de dessin animé crayonné et joyeux, paillard et vengeur.
Voici donc Ella, superbe jeune femme à la robe jaune et la taille de guêpe anorexique. Sauvée d’un comique accident d’auto-tamponneuses par Jack, un immense colosse body-buildé aux anabolisants. Bien sûr, ils vont s’aimer, passionnément, c’est tellement mignon de voir la belle se donner à la bête. Mais Jake, agent de station-service dans le civil est si beau qu’il séduit toutes les automobilistes qui s’arrêtent à sa pompe. Pour faire le plein. Les intrigantes imaginent les pires stratagèmes pour défaire son couple. Mais un magicien fellinien propose ses services à une Ella désespérée. Courage, Ella!
Un film de Plympton se reconnait à la première seconde. Il réjouit aussitôt. Américain iconoclaste des belles images officielles de l’oncle Sam Disney, il maîtrise autant l’humour que la satire. En érotisant au passage son délire anar, il tacle sans démonstration le bien-penser. Certes, on l’avait déjà regretté sur ses précédents longs-métrages, il peine un peu sur la durée. Sa vivacité n’est jamais aussi aiguë que dans ses courts. « Les amants électriques », avec ses personnages plus stylisés que jamais, est à savourer pour ses meilleures séquences. Elles ne manquent pas.
Et toujours:
– Les trois soeurs du Yunnan – Wang BING
– L’étrange Petit Chat – Ramon ZURCHER
– Real – Kiyoshi Kurosawa
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