Un documentaire qui retrace l’histoire de la construction toujours inachevée de la Sagrada Familia à Barcelone. Et « I used to be darker » en DVD.
Gaudi, Le Mystère de la Sagrada Familia – Stephan HAUPT (Suisse) – 1h29
par JAG
C’est l’un des monuments les plus surprenants de l’histoire de l’architecture religieuse. Un homme, Gaudi, aussi génial qu’entêté, ajoute la démesure de ses intentions à la gloire de Dieu. C’est cette épopée que retrace le documentaire très « ciselé » de Stefan Haupt.
A l’origine de ce gigantesque projet, l’association des dévots de Saint Joseph. Un premier architecte Francesc de Paula Villar ne reste qu’un an. Gaudi lui succède. Le jeune adepte de l’Art Nouveau a 30 ans. Il va consacrer son temps et finalement sa vie à cette création. Ses connaissances liturgiques le guident dans la signification religieuse qu’il entend donner tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du bâtiment. C’est une cathédrale naturaliste-moderniste qu’il imagine. Ce qu’il veut: créer une bible de pierre.
Renversé par un tramway en 1926, Gaudi meurt à 76 ans, il n’en verra que la façade de la Nativité et la tour Saint Barnabé. Il laisse à ses successeurs la lourde responsabilité de continuer l’inachevé en respectant son style architectural si personnel. L’anecdote veut qu’il leur ait confié dans un souffle : « vous devez être capables de poursuivre mon travail. »
De 1926 à 1936 l’assistant de Gaudi, Somènec Sugranes termine les 3 tours de la façade de la Nativité.
La guerre civile espagnole interrompt les travaux. Des Eglises brûlent. Un incendie dévaste une grande partie de l’atelier de Gaudi et détruit ses dessins, ses plans et ses maquettes. L’arrivée de Franco au pouvoir, un financement essentiellement lié aux aumônes et aux visites, sont d’autres freins à la poursuite des travaux. L’histoire de cette construction est donc étroitement liée à celle de la Catalogne et de l’Espagne.
Ils sont des milliers: ouvriers, architectes, maçons, sculpteurs à se poser la question de l’héritage et du respect des intentions du maître. Le documentaire de Stefan Haupt nous fait partager au plus près le questionnement de ces bâtisseurs d’aujourd’hui, partagés entre fidélité et modernité. La magie des lieux, encore encagés de ferraille, est remarquablement rendue par les images du réalisateur et leur puissance est au cœur du récit des bâtisseurs d’aujourd’hui.
Le sculpteur japonais Esturo Sotoo est sur le chantier depuis 30 ans. C’est lui qui a achevé en 2000 la statuaire de la façade de la Nativité commencée par Gaudi. Sa démarche semble mystique dans son souci d’honorer Gaudi. Ne dit-il pas qu’ « être un bon sculpteur… C’est regarder dans la direction de Gaudi »? Pour mieux y parvenir il a abandonné le bouddhisme et s’est converti au catholicisme.
Josep Maria Subirachs, sculpteur catalan a lui réalisé en 1986 la statuaire de la façade de la Passion. Il a résolument opté pour son style et son époque ce qui lui a valu de très vives critiques. Il se serait forcément par trop écarté du maître.
Les outils, les techniques et les matériaux de l’architecture ont évolué. Reconstruire à l’identique le passé met l’architecte mal à l’aise. L’ordinateur n’a plus rien à voir avec « la richesse du travail manuel qui a élevé les tours de Gaudi« , « Nous sommes désormais dans l’après-Gaudi« .
L’urbanisme contemporain limite à son tour les perspectives de l’ambition originelle. Le dégagement manque pour la façade de la Gloire sur une avenue que Gaudi imaginait ouverte.
Un tunnel est creusé sous la façade de la Gloire pour le passage du TGV.
La titanesque aventure du monument le plus visité d’Espagne peut encore durer 30 ans. La volonté féroce et jamais démentie d’achever le glorieux bâtiment a commencé il y a près d’un siècle et demi. Gaudi qui disait « Dieu n’est pas pressé« , repose à jamais dans la crypte de la chapelle dédiée à la mère du Dieu des Carmes. Rien ne presse non plus ses successeurs. Tout est bien ici question d’éternité.
*
DVD
I used to be darker – Matt PORTERFIELD (USA) 1h30
Kim et Bill, deux musiciens quadras sont en train de se séparer quand débarque Taryn, 19 ans, une nièce en fugue de son domicile familial irlandais. Elle retrouve Abby, sa cousine. Deux meilleures copines que tout oppose. Le sujet principal reste l’ambiance délétère de la séparation, mais la relation de ces deux post-ados à la fois insouciantes et résignées agit comme un choeur de la chronique d’une rupture consommée en musiques. Porterfield, directeur d’acteurs juste et raffiné, met en scène avec la même efficacité la brutalité, la mélancolie et la grâce.
Bonus un peu riquiqui, mais on s’amusera à voir les scènes coupées avec Adèle Exarchopoulos dont on se demande comment elle était arrivée sur ce projet. Dans une (trop) courte interview, Matt Porterfield concède qu’il préfère les personnages aux histoires. En l’occurrence, au vu de son film, on adhère.
(re) voir la chronique de Ciné, cinoche du 25 décembre 2013
DVD, ED Distribution – 16 €
RR
(Re) voir son entretien avec Philippe Lefait à propos de « Grand central«
Et toujours, les e-toiles de dmdm
- D’une vie à l’autre – Georg MAAS (1h37)
- La frappe – Sung-hyun YOON (Corée) 1h56
- Ali a les yeux bleus – Claudio GIOVANNESI (Italie) 1h39
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