Faites la guerre, pas l’amour… Triste postulat mis en question dans un film serré que la haine empêche d’être romantique.
Soleil de plomb – Dalibor MATANIC (Croatie) – 2h03
En l’occurrence, on est dans deux villages voisins de ce qui va devenir, est devenu, l’ex-Yougoslavie.
1991, les premières heures d’un conflit qui va ouvrir sur d’inimaginables barbaries. Jelena et Ivan, la jeunesse et la beauté, pas l’insouciance, ils s’aiment mais doivent se cacher: il est croate, elle est serbe, danger de mort…
2001, la guerre est finie, pas la haine. Les paysages ne sont que ruines et désolations. Natasha, serbe, revient avec sa mère dans leur maison. C’est Ante, un artisan astucieux qui se propose pour en réparer les sérieux dommages. Natasha ne l’accepte pas: il est croate. Et pourtant…
Le déclic a eu lieu lorsque je me suis rappelé ce que me disait ma grand-mère lorsque nous parlions de mes petites-amies: « tant qu’elle n’est pas l’une des leurs… » Avec ce film, je veux que ceux qui se haïssent puissent se voir tels qu’ils sont.
Dalibor Matanic, cinéaste croate
Une claque cinématographique
Au delà d’une intelligente allégorie contre la stupidité et la stérilité de la haine, pour qu’une humanité divisée retrouve les chemins des fondamentaux de l’amour, Soleil de plomb est un flash de grand cinéma. Aucun gras nulle part, la tension est permanente qui, dans un scénario implacable, presque brutal, écarte toute forme d’angélisme et de psychologie de comptoir. Dalibor Matanic, qui signe cette histoire fataliste qu’il voudrait autre, est aussi un metteur en scène précis qui ne mâche pas ses choix ni ses plans. Dans des décors aussi sobres que beaux et signifiants, il ne s’embarrasse pas d’effets pour aller à l’os au plus vite, donc à l’essentiel. Belle astuce de mise en abime vers l’universel, il emploie les mêmes comédiens (Tihana Lazović et Goran Marković) pour les trois histoires. Des comédiens absolument formidables qui portent d’un bout à l’autre un film douloureux mais nécessaire.
PS à ce Ciné, cinoche: il faut se presser d’aller voir Kaili Blues du jeune cinéatse chinois Bi Gan qui bouscule les fondamentaux du cinéma de son pays et d’ailleurs. Un film gigogne vers l’infini de nos vies qui laisse pantois.
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