Cette Anna n’est pas seulement une mère courage, c’est une femme séduisante pourtant trompée. Un premier film épatant autant dans son propos que dans sa façon.
On est en Hongrie, on sait que la vie n’y est pas facile pour beaucoup.
Voici Anna qui voudrait dire qu’on s’en arrange, pas le choix. Belle quarantaine, à peine fatiguée. Trois enfants: Simon, 8-9 ans, tête-en-l’air, insouciant en dehors de ses addictions aux héros des jeux vidéos, Sari la cadette, drôle de bout de chou, Marko, encore bébé. Et leur père, son mari, Szabolcs dont elle sait qu’il est tenté de partir avec une autre, Gabi, qui est (était) pourtant aussi son amie. C’est d’ailleurs ainsi que le film s’ouvre dans une étonnante séquence ou l’indésirable s’invite à la maison.
Trompée, déshonorée mais pas découragée, les enfants d’abord. L’horloge en témoigne, elle rythmera cette folle mais habituelle journée, Anna est debout à 6h30, elle réveille avec une infinie tendresse les marmots. Petit déjeuner, ambiance gaie, Anna et Szabolcs se répartissent les tâches, emmener les uns et les autres à la crèche, la maternelle, l’école, puis le violoncelle, l’escrime, la danse… Le tout à inscrire dans sa journée de prof d’italien précaire où il lui faut faire avec des horaires jamais les mêmes. Journée à 100 à l’heure, bel exercice de jonglerie générale. Et au dîner Szabolcs qui n’est pas rentré. Ailleurs? Gabi? C’en est peut-être trop, pour une femme, même courageuse.
Comédienne et réalisatrice majeures
Chronique hyperréaliste d’une grande vérité d’une femme et mère de famille qui dans un désarroi qu’elle tente de laisser de côté. Son amour conjugal est en berne, pas celui qu’elle porte indéfectiblement à ses enfants. Elle est étonnante cette Anna, convaincante et tellement empathique. Elle donne tout, reçoit beaucoup moins. C’est sa beauté, la beauté du film de cette journée captée à l’arrache multipliant les détails (y compris sonores) qui font un quotidien malmené mais assumé.
Il faut louer le talent d’une comédienne, Zsófia Szamosi, saluer aussi, d’abord, la réalisatrice Zsófia Szilágyi qui signe pour un premier long-métrage une mise en scène maîtrisée, domptant notamment l’inévitable improvisation des scènes intégrant les enfants qui, en vrai, ne sont pas de la même famille. On croirait le contraire.
Bluffant autant que touchant.
Anna, un jour – Zsófia Szilágyi (Hongrie) – 1h38
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