Lydie Salvayre 📚 Pascal Rabaté, Ousmane Sow, 🎭 Anouk Grinberg et François Morel qui dit « On va mourir! » #355
Le mot tendresse leur va bien à toutes et à tous. À la romancière dans sa louange de l’homme aimé, de la littérature, de l’évidence de l’autre; Au « géant » Ousmane qui a fait connaître à Anouk, la comédienne un lieu « d’absolue perfection » où la vie peut s’arrêter; à l’humoriste qui malgré sa méchanceté ne fait que la convoquer à la fin de ses spectacles; au dessinateur de l’inter case où se jouent les hasards. C’est Des mots de minuit : métis, radical, réjouissant !
Des mots de minuit : émission N° 355 du 30 septembre 2009
Réalisation: Guy Saguez
Rédaction en chef : Rémy Roche
Production: Thérèse Lombard et Philippe Lefait
© desmotsdeminuit.fr/France2
CONVERSATION:
Je dis à mes enfants métis qu’ils ont la chance d’avoir naturellement deux civilisations. Moi, n’étant qu’Africain, j’ai eu deux civilisations puisque la France m’a happé à la sortie de l’adolescence – la bonne période, celle où l’on peut être malaxé. J’ai eu la chance de tomber sur des gens fantastiques et, à l’époque où je travaillais à l’hôpital Laennec pour gagner ma vie parce que je n’avais pas de bourse… c’était il y a 50 ans… on peut avoir l’impression que je fabule… mais qui penserait aujourd’hui que quelqu’un pouvait entrer dans un commissariat pour y dormir parce qu’il ne savait pas où aller? C’est ce qui se passait. J’entrais et on m’ouvrait une cellule, on me donnait une couverture. La seule obligation était de laisser sa carte d’identité pour renseigner la main courante de cet accueil.
Ousmane Sow. DMDM, septembre 2009.
Le sculpteur (mort en 2016) est reçu à l’occasion de la publication de la biographie signée par Béatrice Soulé (dessins de Christophe Humbert) « Même Ousmane Sow a été petit » paru aux éditions Actes Sud. Il évoque son enfance et son parcours artistique.
Ce « géant » selon Grinberg mesure 1m93.
J’ai connu Ousmane en Afrique. Il m’a emmenée -pour moi- dans le plus bel endroit du monde. Chaque fois, j’y repense en me disant: « C’est là que je voudrais mourir! » et quand j’y étais, je me disais: « Vraiment, je voudrais que la vie s’arrête là! » Et c’est avec lui que j’ai connu un moment d’absolue perfection. D’ailleurs, on ne pouvait plus parler et ça ne manquait pas. J’ai toujours eu l’impression qu’avec lui c’était comme avec le Victor Hugo de la sculpture, tout simplement parce que c’est un homme qui ne fait pas de baratin. C’est un géant qui travaille les géants, ces hommes qui naissent de ses mains… et lui qui ressemble à ses hommes…
Anouk Grinberg. DMDM, septembre 2009.
L’actrice évoque sa rencontre avec Ousmane Sow et présente son spectacle « La correspondance de Rosa Luxembourg: Rosa la vie » qu’elle joue aux Théâtre de la Commune à Aubervilliers. Elle évoque également sa peinture.
« L’objet qui la prolonge… » Une sculpture inachevée de Jean-Yves Gosti , un « bonhomme en chantier » auquel il manque la bouche et les yeux. Elle dit que « C’est un bon petit-frère » , qu’il est « gentil » et que cet inachèment lui a appris à faire « gaffe à ne jamais trop bien terminer ».
Au départ, je voulais pas me moquer, je voulais faire un spectacle méchant. J’en avais marre qu’on dise que François Morel est gentil! Ça m’agace. Je suis pas du tout gentil! J’ai un goût pour les humoristes méchants comme Reiser. J’avais donc envie d’un truc plus rentre dedans, méchant, sur le tourisme de masse, sur les gens qui vont au bout du monde et qui ne regardent rien. Je voulais un truc vengeur, en colère…. Le premier soir, les specateurs m’ont dit :« Vous êtes tendre. Qu’est ce qu’on les aime vos personnages!
François Morel. DMDM, septembre 2009.
Le comédien parle de son spectacle « Bien des choses » joué aux Théâtre de la pépinière, et du livre au titre éponyme.
« L’objet … » Une carte postale dans laquelle Jean Rochefort accepte tout en fantaisie et facétie de participer gracieusement à son spectacle.
François Morel et le dessinateur et cinéaste Pascal Rabaté sont co-auteurs du livre « Bien des choses » paru aux éditons Futuropolis, qui reprend le texte original du spectacle. Rabaté évoque ses deux derniers ouvrages « Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune » et « Les petits ruisseaux » parus chez le même éditeur.
J’essaye de créer des hasards dans mes bouquins, de ne rien prévoir à l’avance… Parler de la sexualité du troisième âge sans qu’il y ait un minimum de désir ou de regard, ça n’a pas d’intérêt… Je laisse ouvert. Si, dans un film, dans une œuvre d’art, il n’y a pas la possibilité d’interprétation, un hors-champ, une liberté, ça n’a pas d’intérêt. Ce que je réussis le mieux en BD, c’est les inter cases, c’est ce que les gens vont y mettre!
Pascal rabaté. DMDM, septembre 2009.
« L’objet… » Un tire-bouchon -au premier degré, quoique!- trouvé dans un magasin d’articles de pêche. Les parents du dessinateur tenaient le même type de commerce.
Celui que j’appelle BW dans le livre fait un décollement de rétine. Il est opéré en urgence et pendant trois semaines il est prisonnier de son lit, dans le noir, et aveugle. Et il va me parler pour que je reste assise auprès de lui le plus longtemps possible. Il va me parler de sa vie passée, de sa vie présente après s’être oublié. Je pense qu’il s’est oublié tant il s’était immergé dans son métier d’éditeur et il va me parler de lui, de cet état de captivité dans lequel il est. Il va se poser les questions qu’il avait laissées de côté, concernant l’édition notamment. Est-ce que je travaille selon mon cœur dans ce métier? Est-ce que je peux habiter la littérature et en même temps le milieu littéraire qui me débecte? Est-ce que les mutations qui affectent l’édition ne m’en chassent pas? Et il me dit un jour: « Je vais quitter la maison d’édition que j’ai créée. » Et je me suis dit que je devais absolument faire la louange de ce geste de partir que personne ne comprenait autour de nous.
Lydie salvayre. DMDM, septembre 2009.
La romancière signe « BW » aux éditions du Seuil, l’histoire d’un homme (il est éditeur et elle l’aime) qui, à plusieurs reprises dans sa vie a choisi de partir et de tourner le dos à ce qui ne répondait pas à sa soif de liberté.
« Tous deux nous nous sentons poussés comme jamais par une nécessité impérieuse. Pour lui, celle de dire ou de sombrer. Pour moi, celle d’écrire ces mots-là, et aucun autre. »
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