Une poétesse, un peintre: « Un amour à l’aube », un roman d’Elisabeth Barillé.
Ils ont la passion de l’art chevillée au corps et la certitude de leur destinée.
Elisabeth Barillé lève un voile sur l’histoire d’amour entre Amadeo Modigliani et Anna Akhmatova
C’est l’histoire de deux êtres que tout semble séparer. Elle est russe, poétesse et vient juste de se marier. Il est juif italien et hésite entre la peinture et la sculpture. Nous sommes en 1910 à Paris. Elle, c’est Anna Akhmatova « beauté singulière, beauté travaillée, beauté gagnée sur d’éclatants, d’insupportables défauts -nez cassé, cou à n’en plus finir- beauté arrogante« . Lui, c’est Modigliani, Modi pour les intimes, un mètre soixante cinq, un magnétisme à tout casser. Deux astres qui ne vivent que pour leur art, traquant la beauté dans ses moindres recoins. Mus l’un et l’autre par le même idéal tyrannique. De leur rencontre, on ne sait rien ou presque. Quelques documents, journaux intimes, témoignages lacunaires.
En 2010 à Paris est mise aux enchères chez Christie’s une « tête de femme en pierre calcaire, 64 cm, exécutée en 1910-1912 signée, en son dos, Modigliani« . Au même moment au Musée Akhmatova de Saint-Pétersbourg, la romancière Elisabeth Barillé tombe en arrêt devant un portrait de la poétesse russe dans lequel elle reconnaît sans hésiter le trait de Modigliani. On ne pouvait rêver hasard plus heureux ni sujet plus romanesque. La tête de femme vendue à prix d’or n’aurait elle pas été inspirée par Anna Akhmatova? Quel lien unissait ces deux êtres? N’écoutant que son attirance pour les personnages en quête d’absolu la romancière va se lancer sur les traces de ces deux solitaires.
Quand Anna arrive à Paris elle sait avec certitude depuis l’enfance qu’elle sera poète mais n’a encore rien publié. Modigliani, quant à lui, travaille sans relâche sachant que son temps est compté. Chacun à Montparnasse s’accorde sur son génie mais Modi pour l’heure ne trouve ni acheteur ni collectionneur. L’un et l’autre sont à l’aube de leur destin. A ce moment charnière où tout va se jouer. Modigliani entend « s’étourdir de beauté, comprendre la beauté et l’enfanter ». Akhmatova veut « du jamais écrit. Chercher. Trouver. Perdre. Sentir tout de même que l’on tient quelque chose« . Même exigence chez ces deux êtres qui vont se soutenir, s’épauler et permettre à l’autre de devenir ce qu’il est. « Le souffle de l’art n’avait pas encore brûlé, transfiguré ces deux existences- écrit Anna Akhmatova- C’était l’heure diaphane et légère d’avant l’aube« . C’est ce moment précieux, cette passion fondatrice qui ne dura guère plus de deux ans qu’Elisabeth Barillé raconte avec fougue et précision s’appuyant sur de rares documents qui ne feront qu’attiser son imagination. Qu’importe qu’Anna et Modi se soient rencontrés à la Rotonde ou pas. Tel est le choix que revendique la romancière et dont le talent fait que l’on y croit. Qu’importe que le mari d’Anna, le poète Goumiliov, ait été présent ou pas. Seule compte l’ivresse de ces moments là et la justesse avec laquelle Elisabeth Barillé capture dans ses filets la vérité de ces deux êtres liés par leur amour de la beauté.
Quand Anna arrive à Paris elle sait avec certitude depuis l’enfance qu’elle sera poète mais n’a encore rien publié. Modigliani, quant à lui, travaille sans relâche sachant que son temps est compté. Chacun à Montparnasse s’accorde sur son génie mais Modi pour l’heure ne trouve ni acheteur ni collectionneur. L’un et l’autre sont à l’aube de leur destin. A ce moment charnière où tout va se jouer. Modigliani entend « s’étourdir de beauté, comprendre la beauté et l’enfanter ». Akhmatova veut « du jamais écrit. Chercher. Trouver. Perdre. Sentir tout de même que l’on tient quelque chose« . Même exigence chez ces deux êtres qui vont se soutenir, s’épauler et permettre à l’autre de devenir ce qu’il est. « Le souffle de l’art n’avait pas encore brûlé, transfiguré ces deux existences- écrit Anna Akhmatova- C’était l’heure diaphane et légère d’avant l’aube« . C’est ce moment précieux, cette passion fondatrice qui ne dura guère plus de deux ans qu’Elisabeth Barillé raconte avec fougue et précision s’appuyant sur de rares documents qui ne feront qu’attiser son imagination. Qu’importe qu’Anna et Modi se soient rencontrés à la Rotonde ou pas. Tel est le choix que revendique la romancière et dont le talent fait que l’on y croit. Qu’importe que le mari d’Anna, le poète Goumiliov, ait été présent ou pas. Seule compte l’ivresse de ces moments là et la justesse avec laquelle Elisabeth Barillé capture dans ses filets la vérité de ces deux êtres liés par leur amour de la beauté.
En 1911 Anna regagne sa Russie natale où elle atteindra la célébrité sur le tard. Celle qui refusait d’ être considérée comme la muse de Modigliani et ne posa jamais pour lui écrira « il fut le seul homme qui pouvait à n’importe quelle heure de la nuit se retrouver sous ma fenêtre. Je l’acceptais sans rien dire. » Mais c’est à Modigliani que l’on doit cette phrase inoubliable « Vous êtes en moi comme une hantise« . Récit ardent « Un amour à l’aube » est à l’image de ces deux êtres de lumière: éblouissant.
Un amour à l’aube – Elisabeth Barillé – Grasset, 208 pages.
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