Un torrent de feu, un enfer de puissance, la caméra est juste sous la bouche furieuse de la tuyère. La fusée s’arrache de l’attraction terrestre, objectif lune. A bord, Armstrong, le commandant de la mission Apollo 11, Aldrin et Collins, Cap Canaveral, 16 juillet 1969. Une aventure technologique et humaine historique que retrace ce documentaire qui mérite le titre de chef d’œuvre du genre.
Moonwalk one (1970) – Theo KAMECKE (USA) – 1h48
En accord avec la NASA qui avait souhaité communiquer fortement sur l’évènement pour vanter les bienfaits de la conquête spatiale, Theo Kamecke décide de faire un doc sur la mission Apollo 11. Il va filmer les préparatifs, l’ambiance des centaines de milliers de curieux qui se sont massés à proximité du pas de tir. Le pas de géant pour l’humanité va être suivi par une foule qui s’est trouvé un nouveau Luna Park avec ses odeurs de barbecues installés autour des mobil-homes entassés.
L’agence spatiale américaine fait aussi son cinéma: elle a placé 240 caméras au plus près de son engin. En cas de pépin, les films seraient analysés image par image pour comprendre ce qui aurait foiré. Tout s’étant bien passé, les négatifs ne sont même pas développés. Kamecke les récupère, les visionne et en retient le meilleur: le spectaculaire décollage ainsi filmé et monté vaut à lui seul d’aller voir Moonwalk One.
Alunissage hallucinant
Les amateurs de sensations fortes seront également comblés par la suite lunaire du film. Dans un clair de terre sans effets spéciaux et jamais vu alors, la mini-capsule s’approche et se pose sur La mer de la Tranquillité. Là on sait tout, les mots préparés mais bien trouvés d’Armstrong quand il descend la dernière marche, le drapeau américain planté et les divers échantillons prélevés. Ce qu’on n’avait pas vu c’est le retour de la capsule vers le module principal piloté par Collins, le pauvre, si près de la lune, il n’en a pas foulé le sol. Un petit point qui grossit peu à peu sur un grandiose panorama de l’astre, c »est l’autre séquence impressionnante du film.
Moonwalk One ne se contente pas d’un simple spectacle, si beau soit-il. Il le remet dans le contexte mondial d’alors, notamment un président Nixon en plein bourbier vietnamien. Il interroge surtout sur l’intérêt de cette aventure incroyable à l’époque, presque banale aujourd’hui. Dans un commentaire qui n’est jamais sentencieux, il suggère qu’il n’y a pas d’avancée technologique sans contrepartie, sans risques, sans conséquences.
Si quelques apartés naturalistes rappellent les torpeurs métaphysiques de Terrence Malick, c’est surtout à 2001, l’Odyssée de l’espace, tourné à la même époque, qu’il renvoie: un ordinateur prenait, contre l’homme, les commandes d’un vaisseau spatial. Et, comme prophétiques, les deux films s’entamment et se terminent sur des images de préhistoire. Des singes primitifs dans le film de Kubrick, l’extraordinaire et incompréhensible construction mégalithique de Stonehenge dans celui de Kamecke…
Le film, date de 1970, il n’avait jamais été distribué à l’époque, c’est une chance qu’il soit désormais dans les salles françaises.
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