Extérieur nuit, une ville de province, sans doute au sud, Marc rate son train de retour sur Paris, il est inspecteur des impôts. Dépité mais pas vaincu, ce grand coureur croise par hasard une femme, normale mais jolie et lui emboite le pas. C’est pas comme d’habitude, ils passent la nuit à déambuler dans les rues, au petit matin, il ne savent presque rien de l’autre, pas même leurs identités, sauf que ces heures platoniques leur impose de se donner rendez-vous. Fixé à Paris, aux jardin des Tuileries quelques jours plus tard. La perspective est si étourdissante que Sylvie, c’est son nom, largue aussi sec son petit copain, apparemment de plus en plus petit, ils avaient prévu de partir s’installer aux USA.
Sylvie tient avec sa sœur Sophie un magasin d’antiquités. La relation entre les deux soeurs est fusionnelle, unique, indispensable. Le jour du rendez-vous, Marc fait un malaise (3 coeurs est aussi un film cardiaque), il arrive très en retard aux Tuileries, Sylvie est repartie. Effondrée, elle se rabiboche par défaut avec son ex et part avec lui en Amérique. Marc est lui aussi plus que navré de ce love miss, mais aucun des deux ne sait comment contacter l’autre. Le thriller sentimental est en route.
Puisque les hasards font aussi parfois mal les choses, Marc est envoyé en mission dans la ville de l’occasion ratée et il tombe sur Sophie, la sœur, en larmes, la boutique est en redressement fiscal. Puisque tous les inspecteurs des impôts ne sont pas odieux, il la console, la conseille et en tombe amoureux. Un coup de foudre, il se fait muter et ils projettent un mariage. Chacun ignore l’épisode précédent mais des indices puis des certitudes révèlent l’inconfortable réalité à Marc. En effet très inconfortable lorsque Sylvie se pointe au mariage. Et surtout ingérable. Le thriller est désespéré, désespérant.
2 sœurs, 3 cœurs
Benoit Jacquot qui a réussi beaucoup mieux que d’autres à filmer et raconter les femmes, des actrices qui furent aussi ses muses, s’essaye dans 3 cœurs à se concentrer sur un mâle. On ne se refait pas aussi facilement. Si on est pas sûr de croire à la vraisemblance de cette incroyable collision insuffisamment construite en amont, on est surtout pas sûr que Jacquot s’intéresse aussi bien aux hommes (qu’il a maltraité précédemment) qu’aux femmes. Poelvoorde, bien qu’au meilleur de ses rôles dramatiques, inquiet, torturé, semble parfois s’interroger sur ce qu’il fait dans ce mélo. Et comme le naturel revient au galop, c’est surtout les deux sœurs qui emballent et chavirent la caméra de Jacquot. Sophie/Chiara Mastroianni, juste hypersensible et innocente, qui ne la prendrait dans ses bras en pareilles circonstances? Mais c’est surtout sur Charlotte que Jacquot a flashé. On partage son enthousiasme, Sylvie/Charlotte Gainsbourg est bouleversante dans son tranquille désespoir amoureux. Ses regards, qui savent aussi affronter, impressionnent, autant que ses mots dont elle sait organiser le poids.
Charlotte Gainsbourg est aussi une grande actrice.
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