« Et vous avez eu beau temps? » de Philippe Delerm, les petites phrases assassines
S’il est un genre dans lequel l’auteur de « La première gorgée de bière » excelle c’est bien la forme courte. La preuve en 70 leçons qui épinglent ces petites phrases assassines qui ponctuent notre quotidien.
Elles sont nombreuses et nous les prononçons la plupart du temps sans y penser. Certaines sont dans l’air du temps comme ce « Je reviens vers vous » emprunté au langage commercial ou ce « C’est juste insupportable » accommodé à toutes les sauces ou ce « Pout être tout à fait honnête avec toi » qui laisse volontiers présager le pire. Philippe Delerm les a consciencieusement notées puis décortiquées avec le talent d’observateur et de linguiste qu’on lui connaît. Le résultat n’est pas banal et tient en un recueil de 70 petits textes aussi réjouissants que bien troussés dans lequel chacun trouvera forcément La petite phrase qu’il lui arrive parfois de prononcer.
Leur point commun? Une bienveillance qui n’est bien sûr qu’apparente. Ainsi celui à qui l’on demande à son retour de vacances et tandis qu’il arbore un teint cachet d’aspirine « Et vous avez eu beau temps? » ne se leurre généralement pas longtemps quant aux intentions de son interlocuteur à qui il se retient de répondre: « J’ai eu un temps pourri. Grand bien vous fasse. » Ce dont il aurait pu se douter dès l’amorce de la phrase avec ce « Et « qui se serait volontiers fait oublier si Philippe Delerm ne l’avait débusqué: « Quelle traitrise virtuelle dans ce mot si court, apparemment si discret, si conciliant. Dire qu’il ose se nommer conjonction de coordination! Il faut toujours se méfier de ceux qui prétendent mettre la paix dans les ménages. De ceux qui se présentent avec une humilité ostentatoire: je ne suis rien qu’un tout petit outil, une infime passerelle. Vaille que vaille je relie, j’attache, je ne m’impose en rien. »
Ou encore ce « Je reviens vers vous » dont nous avons tous tendance à nous réjouir comme s’il augurait d’une issue favorable quand l’auteur de « Je vais passer pour un veux con » nous rappelle qu’il ne faut pas s’illusionner. « La franchise du je reviens vers vous, sous sa bonhomie dynamique, devance une argumentation qui peut aller jusqu’au refus. Il faut juste savoir gré de la franchise annoncée d’une réponse, mais ça serait trop de compter qu’elle soit positive ». Puis de conclure « Soyez heureux, ils reviendront vers vous. Mais ce sera pour disparaître. » Malicieux, réjouissant, ce recueil en dit long sur les petits arrangements de l’âme humaine que Philippe Delerm dépeint avec une jubilation communicative.
Leur point commun? Une bienveillance qui n’est bien sûr qu’apparente. Ainsi celui à qui l’on demande à son retour de vacances et tandis qu’il arbore un teint cachet d’aspirine « Et vous avez eu beau temps? » ne se leurre généralement pas longtemps quant aux intentions de son interlocuteur à qui il se retient de répondre: « J’ai eu un temps pourri. Grand bien vous fasse. » Ce dont il aurait pu se douter dès l’amorce de la phrase avec ce « Et « qui se serait volontiers fait oublier si Philippe Delerm ne l’avait débusqué: « Quelle traitrise virtuelle dans ce mot si court, apparemment si discret, si conciliant. Dire qu’il ose se nommer conjonction de coordination! Il faut toujours se méfier de ceux qui prétendent mettre la paix dans les ménages. De ceux qui se présentent avec une humilité ostentatoire: je ne suis rien qu’un tout petit outil, une infime passerelle. Vaille que vaille je relie, j’attache, je ne m’impose en rien. »
Ou encore ce « Je reviens vers vous » dont nous avons tous tendance à nous réjouir comme s’il augurait d’une issue favorable quand l’auteur de « Je vais passer pour un veux con » nous rappelle qu’il ne faut pas s’illusionner. « La franchise du je reviens vers vous, sous sa bonhomie dynamique, devance une argumentation qui peut aller jusqu’au refus. Il faut juste savoir gré de la franchise annoncée d’une réponse, mais ça serait trop de compter qu’elle soit positive ». Puis de conclure « Soyez heureux, ils reviendront vers vous. Mais ce sera pour disparaître. » Malicieux, réjouissant, ce recueil en dit long sur les petits arrangements de l’âme humaine que Philippe Delerm dépeint avec une jubilation communicative.
176 pages.
> feuilleter quelques pages
► les lectures d’Alexandra
► la critique littéraire desmotsdeminuit.fr
► desmotsdeminuit@francetv.fr
► la page facebook desmotsdeminuit.fr Abonnez-vous pour être alerté de toutes les nouvelles publications.
► @desmotsdeminuit
Articles Liés
- 📷 Philippe Rochot: un grand reporter
Il voulait se consacrer à la photo, un hasard l’a fait grand reporter de radio…
- Les petites musiques d'Émilie Simon
Réécouter "Désert", dans une délicate version live sur le plateau de Des Mots de Minuit.…
- Philippe Genty, l'homme de spectacle et Philippe Descola, l'anthropologue. #62
La curiosité est à sa place dans la Grande Galerie de l'Évolution du Jardin des…
-
« Hollywood, ville mirage » de Joseph Kessel: dans la jungle hollywoodienne
29/06/202053370Tandis que l’auteur du Lion fait une entrée très remarquée dans la ...