La passion de la langue et de la créolité de l’écrivain Raphaël Confiant rencontre la modestie de René Féret, un cinéaste négligé. Un éclectisme militant partagé en musique par le raï de Choubene et les explorations du groupe Mendelson. Métis, radical, réjouissant!
Et pour la musique le groupe de raï Choubène et le groupe Mendelson
MANIÈRES DE VOIR: – Raphaël Confiant, écrivain martiniquais prolifique évoque son dernier roman, Brin d’amour. Plaisir de la lecture et de l’écriture, dit-il, bonheur de travailler la langue ou plutôt les langues. Confiant est un défenseur et un expert du créole dont il rappelle que ses mots et expressions qui peuvent sembler étranges ne sont que l’héritage des « parlures » régionales françaises abandonnées au 18ème siècle. « Je suis un porteur et un passeur de mémoire! » affirme-t-il, il sera joyeusement interrompu par l’irruption sur le plateau du conteur créole Igo Drané en version originale.
L’univers dans lequel j’ai vécu, c’est un univers de culture orale, de conteurs, de musiciens, de gens de la terre, de la mer aussi et l’écriture était étrangère à ce monde là, donc quelque part l’écrivain dans ma société est quelqu’un de relativement à part.
Raphaël Confiant, Des mots de minuit, 2001
– Le cinéaste René Féret a d’abord voulu être acteur et c’est le théâtre qui lui a fait prendre conscience que l’image, donc le cinéma, était au centre de son envie artistique. Sur le plateau, il parle de son dernier film, Rue du retrait, un projet qu’il a peiné à créer, son sujet, la vieillesse et la mort, déplaisant au producteurs… René Féret est habitué à ces difficultés, ses films (une petite vingtaine), bien que d’accès aisé, quand ils sont sortis sur les écrans, ont souvent été cantonnés dans les marges de la distribution. La famille et la fratrie sont le plus souvent au centre de sa filmographie. Sans doute, pense-t-il, parce que c’est dans ce cadre qu’il a connu quelques drames: mort d’un frère aîné, décès douloureux du père.
La création est un acte qui permet de ne pas sombrer dans la folie. Je remplace un frère disparu, c’est la clé de ma recherche, l’image me permettant de faire revivre ce frère. Mais ça n’est pas la finalité, c’est le petit moteur. Chacun de mes films est une tentative de retrouver, de retoucher le contour d’une identité possible.
René Féret, Des mots de minuit 2001
René Féret est mort en 2015 à l’âge de 69 ans.
ACTUALITE CULTURELLE:
– Marjane Satrapi, auteure de la série Persépolis, récit autobiographique en bande dessinée. Elle a grandi pendant la révolution iranienne, ses violences et vexations. Raconter était une nécessité, écrire et dessiner pour elle sont étroitement liés. L’adaptation au cinéma des 4 tomes de la série qu’elle réalise avec Vincent Paronnaud sera récompensée au Festival de Cannes et primée par les César.
Du plus loin que je me souvienne, tout dans mon pays a été violent. Il y a eu une révolution puis la guerre, j’ai quitté l’Iran pour aller vivre en Autriche loin de mes parents. Après je suis revenue faire les Beaux-Arts en Iran, c’était extrêmement violent aussi. La non-violence, je ne la connais que depuis que je suis en France…
Marjane Satrapi, Des mots de minuit, 2001.
Marjane Satrapi
– Catherine Vieu-Charier, élue PCF. Elle parle de son combat dénonçant les conditions de détention dans les prisons françaises, notamment celles dont étaient alors victimes les anciens membres d’Action Directe.
La force d’une démocratie serait de traiter les détenus de façon humaine, de considérer l’humanité dans chaque prisonnier. On les prive de liberté, c’est énorme. Il y a une grande violence que les familles subissent aussi. Parce que la prison c’est aussi les femmes, les enfants, les parents. Catherine Vieu-Charier, Des mots de minuit , 2001.`
Catherine Vieu-Charier
MUSIQUE:
– Le groupe de raï Choubene un mot qui veut dire « jeune » en arabe. D’origine algérienne, ils chantent les amours contrariées ou apaisées, la nostalgie et la possibilité d’un mieux-être.
– Mendelson. Le groupe aux influences éclectiques mêle chanson, rock et free jazz. Il interprète Pinto.