Les Carnets d’ailleurs de Marco & Paula #124: Tous aux abris!
Qui aurait jamais pu penser que Paula trouverait à l’abri-anti-atomique de ses amis suisses un air un peu désuet mais rassurant…
Ces abris anti-atomiques – dit abri PC en référence à la Protection civile – sont de tailles variables, construits spécialement par les communes ou nichés dans des maisons privées. Ils forment un maillage permettant à tout résidant de ne pas devoir marcher plus de 30 minutes depuis son domicile pour se mettre à couvert, ou 60 minutes s’il réside en montagne. Je ne suis pas assez fervente de mathématiques pour imaginer la formule dont découle cette injonction. Si cette formule existe… et si elle tient compte de la résistance de l’air augmentée chez les buveurs de bières?
Depuis 2012, construire un abri chez soi n’est plus obligatoire si sa commune en est déjà bien pourvue; il suffit d’acquitter un droit de « couchage » pour se voir attribuer une place. Les heureux propriétaires d’un abri peuvent choisir la couleur des rideaux mais ont obligation de l’entretenir (système de ventilation, étanchéité, etc) et sont susceptibles d’être contrôlés. Apparement, si l’abri peut être utilisé comme cave à vin, il faut toutefois que certains appareillages, comme la filtration de l’air, soient préservés et en état de fonctionnement.
360 000 abris permettent d’accueillir 8,8 millions d’individus, soit une couverture de 113 % (journal « Le Temps » d’avril 2017). Il reste donc de la place pour quelques nomades bien en peine de transporter un abri dans leurs malles.
Il faut bien réaliser qu’un abri anti-atomique n’est pas affaire à prendre à la légère. Même bien huilée, la porte blindée est massive et inquiétante, comme j’ai pu le constater chez mes amis « de Genève » (en fait un village charmant des environs); j’explorais leur nouvelle maison lorsque j’ai découvert une porte bien mystérieuse aux allures de coffre-fort. Comme ils ne sont pas amateurs de lingots, je suis restée perplexe jusqu’à ce que mon amie m’annonce, comme une évidence, que c’était un abri anti-atomique et accessoirement un bon endroit pour stocker des souvenirs à l’abri de la poussière.
Un soir que nous partagions un apéritif entre voisins, une femme m’a raconté sa consternation d’avoir vécu une grève des agents locaux du bureau pakistanais du Comité International de la Croix Rouge pour lequel elle travaille. Elle ne pouvait admettre qu’une équipe d’un pays forcément fragile, bénéficiant des conditions de travail offertes par le CICR, se mette en grève. Pour que je saisisse sa stupéfaction, il m’a fallu apprendre que le droit de grève n’est guère utilisé en Suisse: Comme me l’a expliqué patiemment une ancienne institutrice, faire grève cela voulait dire quitter l’école à 15h au lieu de 16 heures pour aller manifester, et en veillant à ce que suffisamment d’enseignants restent en poste pour ne pas perturber enfants, parents et administration.
Je serais désolée de donner une image rigide de la Suisse. D’abord, ce petit coin de campagne où je jette l’ancre tous les ans depuis une douzaine d’années maintenant m’est fort précieux. Ensuite parce que les Suisses savent rire, comme je l’ai constaté quand à l’issue de cet apéritif prolongé d’aucuns sont allés jouer avec des feux de chantier en perturbant la circulation – somme toute assez clairsemée à cette heure tardive, il ne faut rien exagérer – entre la Suisse et la France.
Et puis, les Suisses me font parfois bien rire, comme lors de cette discussion sur les forces de sécurité suisses, quand j’ai appris que les avions de la défense aérienne ne peuvent décoller qu’aux heures de bureau (entre 8h et 12h et de 13h30 à 17h). En 2014, ce sont donc des avions italiens et français qui ont ainsi dû escorter un avion détourné qui voulait se poser à Genève bien trop tôt en matinée…
Les Corses, eux, m’ont fait moins rire avec leur tentative « d’attentat » contre ma famille en villégiature chez eux comme des milliers de touristes cet été. Des individus ont soigneusement posé trois pierres en équilibre sur le toit de notre voiture, espérant que leur chute lors du démarrage occasionnerait le bris de la lunette arrière. « Attentat » est un bien grand mot pour qualifier ce message de revendication autonomiste « A Francia fora, Les Français, dehors! »… Je sais! Mais cet acte est dérisoire. À quoi sert-il?
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