– Fruitvale Station – Ryan Coogler (USA) (1h25)
A l’heure du smartphone, tout le monde serait un journaliste potentiel? Pas sûr. Un témoin, certainement, qui peut non plus seulement dire mais montrer.
Les douze coups de minuit de la nouvelle année 2009 venaient tout juste de sonner qu’un drame se produit dans le métro de San Francisco. La police vient d’être appelée suite à une bagarre. Bien que tout soit revenu dans l’ordre quand ils arrivent, les flics choisissent au hasard des coupables, sauf que le hasard fait que les présumés fautifs sont tous noirs. Humiliations, coups, propos racistes. Et soudain un coup de feu. Oscar Grant, 22 ans, qui n’avait pas d’arme, est foudroyé d’un tir dans le dos, il décédera quelques heures plus tard. La scène est filmée par nombre de témoins ulcérés par cette violence inutile, injustifiée, mortelle. Mises en ligne aussitôt, les vidéos provoqueront des manifestations, pacifistes, des émeutes aussi.
De ces faits incontestables et incontestés puisque plus tard sanctionnés par la justice qui enverra en prison le gardien de la paix déclaré coupable, Ryan Coogler propose une fiction documentée. Il a le même âge que la victime, il a vécu dans le même quartier, il est cinéaste, il veut témoigner à son tour, à sa façon.
Pour ce faire, il met en images ce qu’auraient pu être les dernières 24 heures d’Oscar. Comme une synthèse de celui qui n’est pas un bad boy, pas un saint non plus, juste un glandeur hésitant entre ses petits deals de cannabis et une vie plus rangée avec sacompagne qui lui a donné une adorable fillette qu’il adore. Car il est brut d’amour pour ceux qui sont importants pour lui, sa mère notamment, personnage central, pourtant femme de tête qui ne s’est jamais gênée pour lui signifier vertement ses errements. Un résumé un rien angéliste, il n’était pas indispensable à ce point pour participer à l’indignation de ce dramatique fait divers. N’empêche que le film a du rythme et du nerf, il vaut pour ce qu’il sait faire de cinéma efficace. Avec des comédiens, tous, les bons comme les méchants, jamais pris en défaut.
Que le cinéma s’empare ainsi du réel, on n’est pas contre, il dit parfois mieux que les journalistes.
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