Dix petits Indiens… L’un chopa le coronavirus et il n’en resta plus que neuf * Les carnets d’ailleurs 🇺🇸 de Marco et Paula #251
Paula découvre deux nouvelles menaces pesant sur les Indiens: le démantèlement de leurs réserves par le « Grand menteur » et la pandémie. Las, elle ne peut pas encore endosser son costume de Little Big (wo)Man.
Notre avocat nous a rassurés, je ne suis pas concernée par les dernières restrictions du « cheetos président » (voir Nomad’s land #244) relatives à la délivrance du permis de séjour permanent, la fameuse Green Card. Ces restrictions ne concernent que les nouveaux postulants, soupçonnés de vouloir venir manger le pain des Américains, pain qui deviendra rare pendant la période de crise économique majeure qui se profile. Et je ne suis pas certaine que les Américains connaissent les brioches. Néanmoins, le dossier de ma carte verte reste coincé dans les tiroirs des services de l’immigration, faute de pouvoir organiser une des dernières étapes de la procédure, à savoir les interviews. Les services publics du gouvernement fédéral sont confinés comme les autres et nul ne sait lorsqu’ils fonctionneront de nouveau normalement.
Ce pays où je ne suis rien …
En attendant, je dois garder profil bas. Je n’ai pas encore le droit d’être activiste dans ce pays où je ne suis rien.
Aussi, j’ai finalement renoncé à adresser un courrier au président de la commission sénatoriale chargée des Affaires indiennes et l’ai transmis à Marco pour qu’il l’endosse. Quelques semaines auparavant, j’avais signé et fait circuler une pétition en ligne pour protester contre une décision de l’administration du « grand menteur » de révoquer le statut de réserve indienne** au territoire des Wampanoag, soit 120 ha dans la presqu’île de Cape Cod. Cette décision pourrait être le prélude au démantèlement d’autres réserves indiennes et à la perte de leurs prérogatives***.
La nation navajo très touchée par le Covid-19 ...
La perte de leur autonomie sur les quelques territoires qu’il leur reste n’est pas la seule crainte actuelle des nations indiennes, le COVID-19 leur est particulièrement néfaste. L’entassement de plusieurs générations dans un même habitat, faute de moyens pour se loger, facilite la propagation et les maladies chroniques fréquentes dans ces populations rendent les malades très vulnérables. La nation navajo a ainsi l’un des plus hauts taux de prévalence du Covid-19 des États-Unis. Selon un article du journal Le Monde (qui reprend en partie un article de Rebecca Nagle du journal The Guardian, le 24 avril, par exemple au Nouveau-Mexique, les Indiens représentent 10% de la population, mais un tiers des décès. Les données ne sont pas connues pour l’ensemble des nations indiennes, car, selon The Guardian, les Indiens n’entrent pas clairement dans les statistiques puisqu’ici en Amérique, on est « blanc », « noir », « latin » ou « autre », mais pas « habitant d’origine ».
Chactas, statue de Francisque Duret (dont l’œuvre s’inspire d’une œuvre romanesque qui marqua la culture française et européenne de la première moitié du XIXe siècle, Atala, ou Les Amours de deux sauvages dans le désert , roman publié par François-René de Chateaubriand en 1801
© Wikymedia.org
Comme j’aime relater aussi de bonnes nouvelles, en voici une assez jolie. Des donateurs individuels de divers pays se sont mobilisés financièrement pour soutenir des nations indiennes et leur procurer eau potable, nourriture et produit d’hygiène pendant ces temps de pandémie. Parmi ces donateurs, une proportion notable d’Irlandais. Ces derniers renvoient l’ascenseur! En 1847, lors de la famine qui ravagea la population irlandaise, la nation des Chactas [ou Choctaw] dans le Sud-est américain leur avait envoyé un don de 173 dollars, l’équivalent de 4 300 euros.
En revanche, dans l’État de Washington, les services de santé indiens ont demandé des kits de tests à leurs homologues de la capitale, Seattle, et ont reçu des sacs mortuaires.
On vit une époque formidable, dessinait Reiser.
* Allusion à Dix Petits Indiens [And Then There Were None], un film américain réalisé par René Clair, sorti en 1945. C’est la première adaptation au cinéma du roman Dix Petits Nègres d’Agatha Christie.
** Le mot « réserve » sonne mal en français. On pourrait parler de « territoires autonomes »
*** Je ne connais pas encore suffisamment ni l’histoire, ni la situation des peuples indiens/amérindiens/native people/peuple autochtone/premières nations, pour détailler leurs conditions d’existence. Lire par exemple, de Camille Laffont, L’horizon perdu des Sioux. Dans la revue XXI, n° 47, été 2019
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